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Droit de la famille — 16456

no. de référence : 500-09-025408-154

CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
GREFFE DE

MONTRÉAL
N° :
500-09-025408-154
(500-04-061411-139)

DATE :
3 mars 2016


CORAM :
LES HONORABLES
ALLAN R. HILTON, J.C.A.
ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.
ÉTIENNE PARENT, J.C.A.


P... R...
APPELANTE - Demanderesse
c.

R... L...
INTIMÉ - Défendeur


ARRÊT


[1] L’appelante porte en appel un jugement du 1er avril 2015 de la Cour supérieure, district de Montréal (l’honorable France Bergeron) rejetant sa requête afin d’être relevée du défaut de produire l’inscription pour enquête et audition dans le délai de rigueur énoncé à l’article 110.1 de l’ancien Code de procédure civile (« ancien C.p.c. »).

[2] Après avoir fait vie commune avec l’intimé de 2002 à 2010, l’appelante dépose et signifie une procédure introductive d’instance cherchant : (a) à confirmer la garde partagée des enfants exercée par les parties depuis leur séparation et (b) à obtenir 15 % de la plus-value acquise sur un immeuble résidentiel appartenant à l’intimé, ou 40 000 $, afin de compenser un enrichissement de l’intimé prétendument injustifié.

[3] Comme le notait récemment notre Cour dans 2949-4747 Québec inc. c. Zodiac of North America Inc.[1], un tribunal doit franchir deux étapes avant de relever une partie des conséquences du retard à produire l’inscription. Dans un premier temps, le tribunal doit s’assurer que la partie requérante a démontré son impossibilité, en fait, d’agir dans le délai prescrit. Il s’agit là d’une question mixte de fait et de droit qui est assujettie, en appel, à la norme de l’erreur manifeste et dominante. Dans un deuxième temps, le tribunal exerce son pouvoir discrétionnaire pour décider s’il y a lieu ou non de relever la partie requérante des conséquences de son défaut. Cette décision discrétionnaire ne peut être infirmée en appel que si elle est abusive, déraisonnable ou non judiciaire, c'est-à-dire fondée sur des considérations erronées.

[4] Dans ce cas-ci, la juge de première instance a rejeté la requête de l’appelante à la première étape en concluant que cette dernière n’avait pas démontré une impossibilité d’agir. Nous sommes unanimement d’avis qu’il y a lieu d’intervenir à cet égard.

[5] L’appelante invoque comme impossibilité d’agir la perte de son emploi de façon inattendue jumelée à son ignorance quant au délai de rigueur applicable. Cette perte d’emploi lui fut annoncée le 25 juin 2014 et est devenue applicable le 9 juillet 2014, soit le jour de l’expiration du délai pour produire l’inscription. Elle soutient que pour des raisons financières et vu l’urgence de réorganiser sa vie à la suite de la perte de son emploi, elle a dû annuler le rendez-vous avec ses procureurs fixé au 2 juillet 2014, ce qui a causé une confusion dans son esprit quant aux délais applicables.

[6] Dans les circonstances particulières en cause, et avec tout le respect dû à la juge de première instance, la perte d’un emploi conduisant à la remise d’un rendez-vous avec son procureur et menant ainsi à une confusion de l’appelante quant au délai de rigueur constitue, quant à nous, une impossibilité d’agir. Tel que le notait le juge Lamer dans St-Hilaire et autres c. Bégin[2], le tribunal « ne doit pas exiger de la part du plaideur la démonstration d’une impossibilité d’agir qui résulte d’un obstacle invincible et indépendant de sa volonté, mais il suffit que lui soit démontrée une impossibilité de fait, relative ». Il en résulte que rares sont les cas où la partie requérante ne réussira pas à satisfaire la condition préalable rattachée à l’impossibilité d’agir[3].

[7] La juge aurait donc dû passer à la seconde étape de l’analyse afin d’exercer sa discrétion judiciaire à la lumière des considérations pertinentes au 3e alinéa de l’article 110 de l’ancien C.p.c., soit le préjudice qui résultera de la décision, le caractère apparemment sérieux du recours, le temps écoulé depuis l’expiration du délai et le comportement à l’égard du déroulement de l’instance[4].

[8] L’appelante subirait un préjudice certain en cas de refus de la relever de son défaut puisqu’il est acquis que sa réclamation à l’égard de l’immeuble résidentiel de l’intimé serait prescrite. Sans se prononcer sur le bien-fondé de ce recours, il n’apparaît pas que celui-ci est manifestement sans fondement, futile ou qu’il ne présente aucune chance raisonnable de succès. De plus, le temps écoulé entre l’expiration du délai pour l’inscription (le 9 juillet 2014) et la requête afin d’être relevée du défaut (le 19 septembre 2014) n’est pas excessif, d’autant plus que les parties s’étaient engagées dans un processus de médiation qui n’a pris fin que le 11 août 2014. Finalement, le dossier ne relève pas un comportement de négligence grave, de désorganisation ou d’insouciance à l’égard du déroulement de l’instance de la part de l’appelante ou de ses procureurs.

POUR CES MOTIFS, LA COUR :

[9] ACCUEILLE l’appel;

[10] INFIRME le jugement du 1er avril 2015 de la Cour supérieure;

[11] AUTORISE l’appelante à déposer dans les 15 jours du présent arrêt une demande pour que l’affaire soit inscrite pour instruction et jugement devant la Cour supérieure.

[12] LE TOUT sans frais de justice, vu la nature du litige.





ALLAN R. HILTON, J.C.A.





ROBERT M. MAINVILLE, J.C.A.





ÉTIENNE PARENT, J.C.A.

P... R...
Personnellement

Me Justin Roberge
Caron Roberge inc.
Pour l’intimé

Date d’audience :
26 février 2016