Droit de la famille — 172, 2017 QCCS 2
04/01/2017 15:37
no. de référence : 450-12-022944-054
Droit de la famille — 172
2017 QCCS 2
JB 3778
COUR SUPÉRIEURE
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE
SAINT-FRANÇOIS
N° :
450-12-022944-054
DATE :
Le 4 janvier 2017
______________________________________________________________________
SOUS LA PRÉSIDENCE DE :
L’HONORABLE
MARTIN BUREAU, J.C.S.
______________________________________________________________________
N... G...
Demanderesse
c.
D... M...
Défendeur
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JUGEMENT
______________________________________________________________________
[1] Le défendeur, par sa requête introductive d’instance en modification des mesures accessoires datée du 10 juillet 2013, demande que soit ajustée une pension alimentaire ordonnée par un jugement de divorce du 11 juin 2010.
[2] Cette requête introductive d’instance est amendée le 24 octobre 2014 et le défendeur y requiert en plus un changement en ce qui concerne la garde de l’enfant, une annulation de la pension alimentaire qu’il verse à la demanderesse et, finalement, que celle-ci soit condamnée à lui verser une pension alimentaire rétroactive à septembre 2010.
[3] Lors de l’audition, qui se tient près de trois ans et demi après l’introduction de cette instance sans qu’aucune justification sérieuse et déterminante à ce sujet ne soit présentée, les parties font plusieurs admissions relatives aux périodes où l’une ou l’autre a assumé la garde de leur enfant, à la rémunération de la demanderesse depuis 2010 et pour partie à celle du défendeur pendant cette même période.
[4] Malgré ces admissions, des divergences importantes sont soumises au Tribunal et elles se résument ainsi.
4.1. Malgré les affirmations du défendeur et les documents produits, les sommes qui apparaissent à ses déclarations fiscales représentent-elles adéquatement ses revenus réels?
4.2. Le défendeur a-t-il raison de réclamer une révision de tous les aspects relatifs à la pension alimentaire qui a pu être payée par l’une ou l’autre des parties depuis 2010?
4.3. Les parties ont-elles agi correctement l’une envers l’autre en ce qui concerne la divulgation de leur rémunération respective depuis 2010 et quant aux modifications qui pourraient être survenues à ce sujet?
[5] Ces trois éléments majeurs doivent être déterminés par le Tribunal. Ceux-ci nécessitent également que le Tribunal détermine ou analyse quelles ont été les bases fondamentales qui amènent les parties, en 2010, à convenir des mesures accessoires au divorce et plus particulièrement le calcul de la pension alimentaire.
Certains éléments et faits pertinents
[6] Le mariage des parties est célébré en juin 2001. Elles cessent de faire vie commune en février 2005 et au mois de mars 2005, la demanderesse entreprend des procédures de divorce.
[7] Ce n’est finalement que cinq ans plus tard, en juin 2010, qu’un jugement de divorce est prononcé et que le Tribunal entérine la convention finale sur mesures accessoires.
[8] Il est prévu dans cette entente que la garde de l’enfant mineure est confiée au défendeur, rétroactivement à octobre 2009. Il est également ordonné que la défenderesse assume seule les frais liés à la fréquentation scolaire de l’enfant et que ces frais soient considérés comme une pension alimentaire susceptible d’exécution.
[9] Il n’y a à peu près aucune information au dossier en ce qui concerne les revenus respectifs des parties en juin 2010, au moment où cette entente intervient, si ce n’est que le défendeur produit un formulaire de fixation de pension alimentaire pour enfant qu’il appuie de sa déclaration sous serment. Il y déclare alors, en ce qui le concerne, pour la dernière année fiscale précédente soit 2009, une rémunération de 12 000 $ et établit celle de la demanderesse, sans aucune documentation, à un montant de 16 859 $.
[10] Ce formulaire fait état d’une pension alimentaire à payer par la demanderesse de 2 161,56 $ soit un montant mensuel de 180,13 $. Toutefois, les parties conviennent dans l’entente homologuée par le Tribunal, qu’il n’y aura paiement d’aucune somme sauf, tel que plus haut mentionné, la prise en charge des frais scolaires. C’est pour l’essentiel ce que fera celle-ci au cours des années suivantes.
[11] La preuve révèle qu’en 2010 et au cours des années suivantes, la demanderesse a bénéficié des revenus suivants :
- 2010 : 30 941,65 $;
- 2011 : 39 825,76 $;
- 2012 : 39 677,14 $;
- 2013 : 36 747,40 $;
- 2014 : 25 875,25 $;
- 2015 : 45 518,79 $
[12] D’autre part, selon les prétentions du défendeur et en fonction des déclarations fiscales qu’il a produites au fils des ans, sa propre rémunération depuis 2010 serait la suivante :
- 2010 : 12 150 ,00 $;
- 2011 : 9 450 00 $
- 2012 : 18 880,27 $;
- 2013 : 22 893,46 $;
- 2014 : 22 282,17 $;
- 2015 : 23 609,95 $
[13] Le Tribunal y reviendra plus loin dans le présent jugement, mais considère que ces revenus du défendeur doivent être majorés.
[14] Quelque soit les revenus du défendeur, celui-ci considère qu’il a droit à une révision rétroactive de la pension alimentaire qu’il a payée ou de celle à laquelle il a droit, puisque, selon se dires, la demanderesse l’aurait induit en erreur en 2010 lors de la conclusion de l’entente sur la pension alimentaire et aurait par la suite fait défaut de l’informer des majorations importantes relatives à sa rémunération.
[15] Le défendeur, bien qu’il a déposé en juin 2010 un document selon lequel les revenus de la demanderesse à l’époque étaient de 16 859 $ l’année précédente, témoigne, sans aucun élément de preuve à l’appui, que l’entente signée en juin 2010 était fondée sur des revenus respectifs des parties pratiquement identiques soit environ 22 000 $ par année. Ces affirmations contredisent sa déclaration assermentée alors jointe à sa demande. De plus, ces affirmations ne sont pas supportées par de la documentation.
[16] Lorsque la demanderesse requiert elle-même, en mai 2013, une modification des mesures accessoires en fonction d’un changement quant à la garde de l’enfant mineur et qu’elle déclare alors des revenus de 39 677 $ pour l’année 2012, le défendeur réplique, pratiquement sans délai, en réclamant une révision des ordonnances alimentaires au motif que la demanderesse ne l’a jamais informé des augmentations significatives de ses revenus.
[17] Il n’y a, dans la convention sur les mesures accessoires signées en juin 2010, aucune réserve ni obligation relative à des avis ou des informations que devaient s’échanger les parties quant à leur situation d’emploi respective ou quant à leurs revenus. Il n’y a non plus aucun élément obligeant l’une ou l’autre des parties à transmettre ses déclarations fiscales.
[18] La preuve révèle que depuis plusieurs années, les communications entre les parties sont difficiles et dans les faits, elles n’ont très peu, sinon aucun contact direct. Elles peuvent avoir été sommairement informées des activités de l’autre conjoint par leur enfant mineur, mais ni l’une ni l’autre, bien qu’elles aient toutes deux eu des changements relativement importants dans leur situation financière ou leurs revenus d’emploi, n’a jugé opportun d’en aviser l’autre partie.
La situation des parties depuis 2010
[19] De façon prépondérante, la preuve révèle que la demanderesse occupe depuis 2009 divers emplois. Au départ, elle est préposée aux bénéficiaires et depuis 2015, infirmière auxiliaire. Elle est retournée aux études en 2014, ce qui justifie une baisse importante de sa rémunération pendant cette période.
[20] Depuis 2009, la demanderesse occupe régulièrement deux emplois chez deux employeurs différents afin d’être en mesure de travailler à temps plein.
[21] Le défendeur est l’unique actionnaire, administrateur et employé d’une entreprise qui offre des services de remplacement de pare-brises à domicile ou sur place. En 2012, invoquant que les revenus provenant de cette entreprise et les activités commerciales de celle-ci ont chuté radicalement, vu les modifications importantes dans le marché, il décide de se trouver un deuxième emploi, 25 heures par semaine comme conducteur d’autobus scolaire.
[22] Le défendeur continue quand même les opérations de son entreprise, mais affirme n’y consacrer qu’une quinzaine d’heures par semaine. Cette entreprise, selon les états financiers produits au dossier, a un chiffre d’affaires, à la fin des années 2000, d’environ 100 000 $ par année. Elle n’a plus, depuis 2011, qu’un chiffre d’affaires variant de 50 000 $ à 68 000 $ par année.
[23] Le défendeur qui se verse avant 2010 une rémunération qui atteint 20 000 $ par an l’a réduite par la suite à environ 13 000 $. Il l’a de nouveau réduite depuis 2013 à des sommes variant de 1 800 $ à 3 500 $ par année.
[24] Le défendeur précise qu’avant de se verser un salaire, il préfère que son entreprise rembourse ses dettes et paie ses fournisseurs.
[25] La preuve révèle qu’en plus du salaire qu’il se verse, le défendeur reçoit de cette entreprise divers montants chaque année en remboursement d'avances faites par lui au fils des ans. Depuis 2009 jusqu’en mars 2015, l’entreprise lui a versé à ce titre environ 13 600 $ soit en moyenne un peu plus de 2 500 $ par année. Pour les années 2014 et 2015, les remboursements ont atteint 3 000 $ et 6 000 $. Pendant cette même période, il s’est versé uniquement 900 $ et 1 800 $ de salaire.
[26] Les états financiers de l’entreprise démontrent aussi que chaque année celle-ci profite d’amortissements sur ses équipements. Les montants à ce sujet ont varié et ont atteint certaines années plus de 2 000 $.
[27] Le Tribunal considère qu’il est difficilement compréhensible que le défendeur consacre, selon ses dires, environ 500 heures par année à une entreprise qui est la sienne, sans qu’il en retire une rémunération qui, à tout le moins, devrait être équivalente au salaire minimum.
[28] Les affirmations de la demanderesse selon lesquelles le défendeur a toujours tiré de son entreprise des revenus occultes assez importants sont peut-être la justification de ces faibles revenus officiels. Il est fort possible que la situation réelle concernant les revenus tirés de cette entreprise soit ainsi faussée.
[29] Quoi qu’il en soit, en tenant compte des salaires officiellement payés par l’entreprise, des sommes versées par celle-ci en remboursement des avances, des montants dont l’entreprise bénéficie au titre des amortissements et du remboursement des dettes pour lesquelles le défendeur a fourni un cautionnement, le Tribunal considère qu’il est certainement approprié et justifié, à tout le moins depuis 2010, d’ajouter au salaire de chauffeur d’autobus ou à tout autre revenu du défendeur un revenu additionnel provenant de son entreprise équivalent à 10 000 $ par année.
[30] Quelles que soient les conclusions auxquelles en arrivera le Tribunal relativement à une rétroactivité des ordonnances alimentaires, il faut ajouter depuis 2010, au salaire provenant de l’emploi de chauffeur d’autobus et à celui provenant de son entreprise, une rémunération additionnelle de 10 000 $. Cela fait en sorte qu’aux fins du calcul d’une pension alimentaire, les revenus du défendeur doivent être établis aux montants suivants :
- 2010 : 22 150,00 $
- 2011 : 19 450,00 $
- 2012 : 25 730,00 $
- 2013 : 30 103,46 $
- 2014 : 31 382,17 $
- 2015 : 31 809,85 $
Les principes de la rétroactivité de la pension alimentaire
[31] En principe, une ordonnance alimentaire devrait prendre effet au moment de la signification de la demande à moins que le Tribunal, usant de sa discrétion, en arrive à une conclusion différente. Toutefois, en vertu des dispositions des articles 15.1 et 17 de la Loi sur le divorce, ainsi que de celles de l’article 595 C.c.Q. il est possible pour un créancier alimentaire, de requérir, pour les besoins des enfants, une rétroactivité des ordonnances alimentaires.
[32] Il est reconnu qu’une demande fondée sur la Loi sur le divorce, peut rétroagir pour une période assez considérable en fonction des critères dégagés par la Cour suprême du Canada dans ce qu’il est convenu d’appeler maintenant la quadrilogie, soit les arrêts B.S. c. S.R.G.; L.J.W. c. T.A.R.; Henry c. Henry; et Hiemstra c. Hiemstra;[1]
[33] Ces critères sont les suivants :
1) Y a-t-il un motif valable qui explique la demande tardive de rétroactivité? (la raison du retard de la demande du parent créancier);
2) Le débiteur a-t-il adopté un comportement fautif ou répréhensible? (le comportement du débiteur);
3) Dans quelle situation se retrouvent les enfants si la demande de rétroactivité est acceptée? (la situation des enfants);
4) Y a-t-il des difficultés occasionnées chez le débiteur par une ordonnance rétroactive? (les difficultés causées par la rétroactivité).[2]
[34] La Cour d’appel du Québec dans l’arrêt C.N. c. P.V[3] semble avoir mis fin à une controverse jurisprudentielle qui s’est développée depuis les amendements apportés par le législateur québécois à l’article 595 C.c.Q.
[35] Dans cet arrêt, la Cour d’appel, après avoir fait état des deux approches développées à la Cour supérieure depuis les amendements à l’article 595 C.c.Q. confirme la seconde approche c’est-à-dire celle qui considère
«…que le nouveau libellé de l’article 595 C.c.Q. permet, de plein droit, de faire rétroagir une demande de contribution alimentaire pour enfant pour les trois années qui précèdent la demande. »
[36] Dans cette décision, la Cour d’appel s’exprime très clairement de la façon suivante :
« [34] En effet, le premier alinéa de l’article 595 C.c.Q. ne comporte aucune exigence de « mise en demeure » ou « d’impossibilité d’agir » afin de réclamer rétroactivement des aliments pour un enfant. Ces restrictions s’appliquent à la demande alimentaire d’un conjoint ou d’un ascendant, mais elles ne s’appliquent plus, depuis les amendements de 2012, aux demandes alimentaires au profit d’un enfant. Il convient d’en prendre note. »
[37] Il semble donc résulter de cette décision de la Cour d’appel, qu’il n’est plus requis, en matière de contribution alimentaire au profit d’une enfant, d’appliquer les critères dégagés par la Cour suprême du Canada et qu’une rétroactivité est possible pour une période de trois ans précédant le dépôt d’une demande d’ordonnance alimentaire.
[38] Comme le précise la Cour d’appel au paragraphe 36 de cette décision :
« …le débiteur alimentaire peut toujours se prévaloir de l’art. 587.2 C.c.Q. afin de réduire sa contribution ou faire valoir d’autres moyens de défense. Par contre, il n’appartient plus aux créanciers de l’obligation alimentaire d’établir une condition préalable afin de faire rétroagir de trois ans la contribution alimentaire parentale du débiteur. Il appartient plutôt au débiteur alimentaire d’assumer le fardeau d’établir que le quantum qui en résulte devrait être ajusté afin de tenir compte, notamment des difficultés énoncées à l’art. 587.2 C.c.Q. »
[39] Il ne semble donc plus avoir beaucoup de latitude dans la discrétion que peut exercer le Tribunal dans l’analyse d’une demande de rétroactivité de pension alimentaire.
[40] Toutefois, le Tribunal considère, puisque chaque cas est un cas d’espèce, qu’il faut quand même examiner attentivement toutes les circonstances d’un dossier et particulièrement s’assurer que si des ententes ont été établies, si des ordonnances antérieures ont été rendues, si des modalités de versement ou d’acquittement de frais ont fait l’objet de consensus entre les parties, il faut respecter l’intelligence et le jugement des parties elles-mêmes. Si de telles ententes ne causent pas de préjudice aux parties et plus spécifiquement aux enfants bénéficiaires des ordonnances alimentaires et si elles se justifient raisonnablement en raison d’autres facteurs et que les parties s’en déclarent satisfaites, il faut être prudent, malgré les dispositions de l’art. 595, dans l’analyse des demandes de rétroactivité.
[41] Il y a des situations où il est difficile de connaître tous les motifs ayant amené les parties à convenir d’une entente quelques années auparavant surtout lorsque ces ententes résultent de négociations et des discussions tenues dans le cadre d’une médiation. Il est alors possible pour les tribunaux de prendre connaissance de l’entente, mais les règles relatives à la confidentialité des séances de médiation font en sorte qu’il est impossible de connaître les motifs des compromis, les raisons de certains aménagements et ce qui peut avoir été abandonné par l’une ou l’autre des parties si les ententes ne font pas état de ces motifs, raisons et concessions.
[42] Lorsqu’une entente intervient et qu’elle est par la suite entérinée par un jugement, il faut présumer que celle-ci est adéquate et respecte les règles fondamentales et d’ordre public en matière d’ordonnance alimentaire pour enfants. Il faut se garder d’appliquer, sans considération ni adaptation, les dispositions de l’art. 595 C.c.Q. et l’interprétation qu’en fait la Cour d’appel dans l’arrêt C.N. c. P.V.
[43] C’est entre autres ce que le Tribunal considère qu’il doit faire dans le présent dossier puisque l’ensemble des circonstances risquent de créer une injustice d’autant que l’enfant pour lequel une pension alimentaire est requise est maintenant majeur et autonome depuis plus d’un an.
[44] Il est également approprié d’indiquer que la requête du défendeur en modification des ordonnances alimentaires date de juillet 2013, qu’elle a été modifiée en fin d’octobre 2014 et n’a été présentée pour décision qu’en décembre 2016. Le défendeur, qui requiert depuis trois ans et demi une modification aux ordonnances alimentaire, ne semble pas avoir posé lui-même, par l’entremise de ses procureurs, les gestes appropriés pour que sa demande soit entendue dans des délais raisonnables et le dossier semble avoir tardé en raison de délais qui peuvent résulter des deux parties, mais particulièrement de l’absence d’informations soumises rapidement par le défendeur.
[45] Par sa demande, le défendeur voudrait que le Tribunal révise les ordonnances depuis 2010 c’est-à-dire depuis le moment où le jugement de divorce intervient et l’entente a est négociée sur les mesures accessoires.
[46] La preuve révèle que les deux parties, en raison d’absence de communication entre elles, n’ont pas divulgué à l’autre de façon claire, les modifications survenues dans leurs revenus respectifs. La preuve révèle également que le défendeur, en utilisant une compagnie personnelle dont il est le seul actionnaire, administrateur et employé, n’a pas divulgué adéquatement toutes ses sources de revenus.
[47] Il est également démontré que pendant toutes ces années, même si la demanderesse a eu des revenus plus élevés que ceux qui semblent avoir été la base de l’entente de 2010, elle a éprouvé des difficultés financières la menant à la faillite en raison de difficultés conjugales avec un autre conjoint. Elle a également, pendant cette période, en vue d’améliorer son sort, décidé de retourner aux études. Cela lui a permis d’obtenir un diplôme d’infirmière auxiliaire faisant en sorte que sa rémunération, depuis 2015, est plus élevée.
[48] Pendant cette période, l’enfant est demeurée en alternance avec l’un ou l’autre des parents, quoique sa présence auprès du défendeur a été plus importante.
[49] L’enfant a également, dans sa dernière année en tant qu’enfant à charge, eu des revenus d’emploi de 10 500 $ par année approximativement. Le défendeur n’a révélé ce fait à la demanderesse qu’assez récemment. Pendant une certaine période, l’enfant ne semblait pas fréquenter l’école. Elle était alors mineure, mais en fonction des règles généralement reconnues dans ce domaine, le Tribunal devra tenir compte, dans l’établissement de la pension alimentaire, d’une partie des revenus de l’enfant pour réduire les obligations alimentaires de la demanderesse envers le défendeur pour celui-ci. Un pourcentage de 35 % de ce revenu doit être tenu en compte.
Les revenus considérés ou établis :
[50] En fonction des éléments plus haut mentionnés en ce qui concerne les revenus respectifs des parties et en tenant compte, pour l’année 2015, d’une partie des revenus obtenus par l’enfant, il y a lieu de conclure que les revenus respectifs des parties sont ceux-ci-après précisés et que la pension alimentaire qu’aurait dû payer la demanderesse au défendeur, ou pendant une certaine période ce que le défendeur devait verser à la demanderesse, devraient être les suivants :
- 2010 : revenus demanderesse : 30 941,65 $
revenus défendeur : 22 150,00 $
Pension mensuelle à être versée par la demanderesse : 281,97 $
- 2011 : revenus demanderesse 39 825,76 $
revenus défendeur : 19 450,00 $
Pension mensuelle à être versée par la demanderesse : 375,92 $
- 2012 : revenus demanderesse : 39 677,14 $
revenus défendeur : 25 730,00 $
Pension mensuelle à être versée par le défendeur pour
la période du 01/01/2012 au 3/10/12 187,85 $
Pension mensuelle à être versée par la demanderesse pour
la période du 3/10/12 au 31/12/12 : 355,48 $
- 2013 : revenus demanderesse : 36 747,40 $
revenus défendeur : 30 103,46 $
Pension mensuelle à être versée par le demandeur : 234,41 $
- 2014 : revenus demanderesse : 25 875,25 $
revenus défendeur : 31 382,17 $
Pension mensuelle à être versée par le défendeur du 01/01/14
au 01/04/14: 276,34 $
Pension mensuelle à être versée par la demanderesse du
01/04/14 au 31/12/14 : 204,50 $
- 2015 : revenus demanderesse : 45 518,79 $
revenus défendeur : 31 809,85 $
revenus enfant 35 % de 10 500 $ 3 675,00 $
Pension mensuelle à être versée par la demanderesse : 94,81 $
[51] En fonction des ces nouveaux calculs, et si le Tribunal accueillait en entier la demande de rétroactivité formulée par le défendeur, la demanderesse devrait donc lui verser les sommes suivantes calculées en lien avec les revenus démontrés ou reconnus par le Tribunal et en tenant compte des sommes ou engagements assumés par la demanderesse en vertu du jugement de juin 2010 :
- 2010 : 611,14 $
- 2011 : 2 349,48 $
- 2012 : 1 014,60 $
- 2013 : (2 812,92 $)
- 2014 : 1 992,28 $
- 2015 : 1 137,72 $
4 292,20 $
[52] Toutefois, si le Tribunal ne fait rétroagir la pension alimentaire qu’à la date de la demande soit en juillet 2013, c’est plutôt au montant approximatif de 3 130 $ que la demanderesse devrait verser au défendeur.
[53] Eu égard à tous les éléments plus haut mentionnés, le Tribunal considère qu’il y a lieu d’ordonner à la demanderesse de verser au défendeur, à titre de rétroactivité pour la pension alimentaire de l’enfant, un montant total de 3 700 $ en fonction des principes établis par la Cour d’appel pour l’application de l’art. 595 C.c.Q. et des circonstances particulières de ce dossier.
[54] Puisque l’enfant n’est plus à la charge du défendeur étant maintenant majeure et autonome et considérant les revenus respectifs des parties et les difficultés que pourrait avoir la demanderesse à verser les sommes auxquelles le défendeur a droit, le Tribunal fixe les modalités de paiement de cette rétroactivité à 100 $ par mois incluant capital et intérêts pour une période de 40 mois à compter de ce jour.
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[55] ACCUEILLE partiellement la requête du défendeur.
[56] REVISE le jugement du 11 juin 2010 quant à la pension alimentaire pour l’enfant X.
[57] ORDONNE à la demanderesse de verser au défendeur à titre d’arrérages de pension alimentaire pour enfant, une somme totale de 4 000 $ incluant capital et intérêts et établit le remboursement de cette somme en 40 versements égaux et consécutifs de 100 $ par mois à compter du 1er janvier 2017.
[58] ANNULE pour le futur la pension alimentaire payable par la demanderesse au défendeur pour l’enfant X.
[59] SANS FRAIS de justice, vu la nature de l’instance.
__________________________________
MARTIN BUREAU, J.C.S.
Me Chantal Kemp Bélanger
Procureure de la demanderesse
Me Mélissa Leblanc
Procureure du défendeur
Date d’audience :
Le 5 décembre 2016
[1] 2006 CSC 37 (CanLII), 2006 2 RCS 231.
[2] BRODEUR, Marie-Josée, LA ROSA, Catherine, Loi sur le divorce annotée, 3e édition, Éditions Yvon Blais, p. 463.