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Centre intégré de santé et de services sociaux de l'Outaouais et J.K., 2017 QCCS 1

04/01/2017 11:18

no. de référence : 550-17-009426-162

Centre intégré de santé et de services sociaux de l'Outaouais et J.K.

2017 QCCS 1

JT 1581

COUR SUPÉRIEURE

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

GATINEAU

N° :

550-17-009426-162

DATE :

4 janvier 2017

______________________________________________________________________

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :

L’HONORABLE

CAROLE THERRIEN, J.C.S.

______________________________________________________________________

CENTRE INTÉGRÉ DE SANTÉ ET DE SERVICES SOCIAUX DE L'OUTAOUAIS

Demandeur

et

J... K...

Défenderesse

et

JE... B...

Mis en cause ______________________________________________________________________

JUGEMENT

Sur requête pour autorisation de soins

______________________________________________________________________






[1] Mme K... a 71 ans, elle est veuve et a trois enfants. Pour la première fois de sa vie elle présente des hallucinations. Son fonctionnement en est perturbé : elle se désorganise; ne mange ni ne dort normalement et sa vie sociale est complètement chamboulée. Ses fils, dont l’un habite avec elle, s’en inquiètent et lui ont fait voir un médecin.

[2] La psychiatre diagnostique une psychose à début tardif et propose un traitement par médication sous surveillance à l’hôpital pour débuter.

[3] Mme K... refuse de s’y soumettre puisqu'elle est persuadée que sa perception des diverses situations est conforme à la réalité et que la solution passe plutôt par une enquête de la police.

[4] Devant ce refus, la psychiatre traitante demande l’autorisation de la traiter contre son gré pour les trois prochaines années et de l’héberger en milieu hospitalier tant qu’elle le jugera nécessaire durant cette période.

[5] Ses fils sont en accord avec la demande.

***

[6] Le Tribunal a entendu Mme K..., l’un de ses fils et la psychiatre traitante.

[7] La preuve établit que Mme K... est inapte à consentir aux soins qui lui sont proposés. Sa perception d’une partie de la réalité est altérée par des éléments qui n’existent pas. Son jugement en est affecté. Elle pose ainsi des actes et prend des décisions qui ne sont pas en phase avec la réalité.

[8] Elle ne peut ainsi rationaliser les bienfaits que le traitement proposé pourra lui apporter.

[9] Son refus est catégorique puisqu’il est motivé notamment par la nécessité d’une enquête policière, qui n’a pas lieu d’être dans les circonstances.

[10] Le Tribunal estime approprié que le traitement pharmacologique proposé soit entrepris. Les bénéfices que Mme K... en retirera sont largement supérieurs aux inconvénients que la médication peut entrainer. Sa qualité de vie actuelle est grandement diminuée par ses symptômes.

[11] Quant à la durée de l’ordonnance recherchée (3 ans), la psychiatre fait valoir que la médication sera vraisemblablement requise pour le reste de la vie de Mme K... et que son arrêt entrainera un nouveau refus et assurément des effets néfastes sur sa santé mentale. Elle demande en conséquence l’ordonnance la plus longue possible.

[12] Bien qu’une condition soit chronique voire irréversible, le refus catégorique de Mme K... de se soumettre au traitement ne peut lui, être présumé pour une aussi longue période.

[13] Notons que Mme K... est très bien entourée. Ses fils ont rapidement consulté et pris les dispositions appropriées. Rien ne permet de croire qu’ils ne continueront pas de le faire.

[14] À ce stade, l’ordonnance la moins invasive doit être privilégiée tout en assurant à Mme K... le droit d’être soignée dignement. Une ordonnance de douze mois permet d’atteindre cet équilibre.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[15] ACCUEILLE en partie la demande;

[16] AUTORISE le demandeur à communiquer au Tribunal, dans le cadre de la présente demande, les informations contenues au dossier de la défenderesse;

[17] AUTORISE le demandeur, le Centre intégré de santé et de services sociaux de l’Outaouais ou tout autre établissement de santé reconnu au Québec, le cas échéant, ayant la charge de la défenderesse, à traiter J... K..., contre son gré, en lui administrant pendant 12 mois un traitement conforme aux exigences de la profession et détaillé comme suit:

• L’administration d’une ou plusieurs médications antipsychotiques, par voie orale ou intramusculaire, selon un dosage médicalement reconnu et conforme aux exigences de la profession;

• Si nécessaire, l’administration d’une médication antidépressive et/ou anxiolytique, selon un dosage médicalement reconnu et conforme aux exigences de la profession;

• Si nécessaire, l’administration d’une médication correctrice, selon un dosage médicalement reconnu et conforme aux exigences de la profession;

• Afin d’instaurer le traitement et assurer une surveillance clinique optimale, l’administration d’examens cliniques (psychiatriques et physiques) réguliers, de prises de sang, d’examens de laboratoire et autres tests requis par le médecin psychiatre traitant (analyses d’urine, ÉCG, ÉEG, imagerie cérébrale, etc…);

[18] AUTORISE tout policier, agent de la paix, ambulancier ou huissier, sur demande formulée par le représentant de l’établissement, après recommandation du médecin psychiatre traitant de la défenderesse, à la conduire contre son gré, par la force si nécessaire, au Centre intégré de santé et services sociaux de l’Outaouais ou à tout établissement de santé reconnu au Québec pour le temps nécessaire à l’administration du traitement autorisé et/ou l’ajustement de la médication, incluant l’hospitalisation de la défenderesse afin de stabiliser son état mental;

[19] ORDONNE au médecin traitant de la défenderesse de soumettre au Directeur des services professionnels (DSP) du Centre intégré de santé et services sociaux de l’Outaouais ou au Comité d’évaluation de l’acte médical de tout autre établissement de santé reconnu au Québec, ayant charge de la défenderesse, toutes les huit (8) semaines, un rapport écrit sur la condition de J... K..., sur les traitements administrés, la réaction aux traitements de celle-ci, ainsi que la nécessité de les poursuivre;

[20] ORDONNE l’exécution provisoire du jugement à être rendu nonobstant appel;

[21] DISPENSE le demandeur de signifier le jugement;

[22] LE TOUT sans frais de justice.

__________________________

CAROLE THERRIEN. J.C.S.

Me Marie-Eve Henrichon

Procureur du demandeur

Me Claude Dostie

Procureur de la défenderesse

Je… B…

Mis-en-cause

Dates d’audience : 16 et 22 décembre 2016