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C.S. c Québec (Société de l'assurance automobile), 2017 CanLII 2888 (QC TAQ)

no. de référence : 2017 CanLII 2888 (QC TAQ)

Section des affaires sociales

En matière de services de santé et de services sociaux, d'éducation et de sécurité routière





Date : 13 janvier 2017

Référence neutre : 2017 QCTAQ 01222

Dossier : SAS-Q-216923-1605

Devant le juge administratif :

CARL LECLERC



C… S…

Partie requérante

c.

SOCIÉTÉ DE L'ASSURANCE AUTOMOBILE DU QUÉBEC

Partie intimée




DÉCISION




[1] Il s’agit d’un recours à l’encontre d’une décision rendue en révision par l’intimée, la Société de l’assurance automobile du Québec, le 26 avril 2016. Cette décision évoque les motifs suivants :
« À la suite de votre demande de révision concernant votre permis de conduire, nous avons analysé à nouveau votre dossier.
Tout d’abord, nous tenons à vous mentionner qu’en présence d’une déclaration de culpabilité à une infraction au Code criminel relative à la conduite d'un véhicule routier, la Société est tenue d'appliquer l'interdiction de conduire prononcée par le tribunal et d'imposer les mesures légales prévues au Code de la sécurité routière (CSR).
Comme mentionné dans notre lettre du 27 février 2014, vous serez admissible à l'obtention d'un nouveau permis à compter du 3 février 2017. Vous devrez satisfaire à certaines conditions, telles que précisées dans notre lettre du 4 février 2016, soit :
− Faire compléter un rapport d'examen médical par un médecin;
− Obtenir une attestation favorable issue de l'évaluation complète effectuée auprès de l'Association des centres de réadaptation en dépendance du Québec (ACRDQ). Il faut prévoir une période de sept à neuf mois pour la réalisation de l'évaluation à I'ACRDQ, c'est pourquoi nous vous suggérons de vous y inscrire sans tarder.
Par la suite, ce permis devra être obligatoirement être assorti d'une condition « X » pour une période de 2 ans, condition autorisant uniquement la conduite d'un véhicule muni d'un dispositif détecteur d'alcool.
L'analyse de votre dossier démontre que toutes les informations concernant les conditions de réobtention de votre permis de conduire vous ont été expliquées à plusieurs reprises.
Il nous est impossible de donner suite à vos demandes d'exemption d'effectuer l'évaluation complète auprès de l’ACRDQ, de faire compléter le rapport d'examen médical et de conduire un véhicule muni d'un dispositif détecteur d'alcool.
Cependant, la Société peut exempter une personne de l'obligation de munir le véhicule qu'elle conduit d'un antidémarreur éthylométrique lorsque des raisons médicales exceptionnelles le justifient, lors de l'admissibilité à un nouveau permis, soit à compter du 3 février 2017, selon les informations contenues à votre dossier. De plus, vous devrez avoir fourni le rapport médical et une évaluation complète favorable auprès de la Société.
Veuillez également prendre note que nous ne donnerons plus suite à vos demandes de révision et vos commentaires en lien avec la réobtention de votre permis de conduire et que seule la réception d'un nouvel avis d'un professionnel de la santé qui nous expliquera en quoi votre condition médicale ne permet pas la conduite d'un véhicule muni d'un antidémarreur pourra désormais motiver une nouvelle réponse de notre part.
Nous comprenons que ces mesures législatives peuvent être contraignantes, mais elles s'inscrivent en conformité avec notre mission de sécurité routière. »
[2] À l’audience tenue le 11 octobre 2016, le requérant est présent et l’intimée est représentée.
[3] D’entrée de jeu, le Tribunal a informé les parties que l’audience ne porterait que sur la question de la compétence à entendre le recours du requérant.
[4] Dans son recours introductif d’instance, le requérant évoque trois motifs comme suit :
« 1. Le rapport d’examen médical demandé par la SAAQ est une mesure redondante et abusive. Voir P-1 Rapport déjà fourni au dossier et d’à peine plus d’un an.
2. La SAAQ refuse d’exercer le pouvoir qui lui est donné par l’art. 2d et 2e) de sa loi particulière pour faire droit à la demande d’être exempté du programme Alco-Lock sa loi particulière pour motifs médicaux sérieux et graves reliées à l’utilisation de l’appareil par l’assuré [nom du requérant]. Voir p-2.
3. SAAQ a omis de me rencontrer (Lja) pour faire valoir mes arguments et avoir omis de m’informer sur le "RECOURS"… »
[5] À l’audience, le requérant a précisé les conclusions demandées comme suit :
« Le REQUÉRANT [nom du requérant] demande :
1. De modifier la décision SAAQ du 4 février 2016 et permettre l'émission d'un permis au requérant sans la condition « X » autorisant uniquement la conduite d'un véhicule muni d'un dispositif détecteur d'alcool;
Pour motifs : ACCOMMODEMENT RAISONNABLE
✔ il s'agit d'une première infraction déjà sanctionnée par les art. 255, 253 et 259 (1.1) C.cs;
✔ le dossier administratif, civil, social et contextuel du requérant n'a pas été regardé et analysé dans sa totalité (L.j.a.) par la SAAQ. Erreurs de fait et de droit;
✔ le fonctionnement et l'utilisation du système Alco-Lock contrevient aux Chartes canadienne et québécoise, principalement en ce qu'il menace la santé et la sécurité du requérant;
Voir dossier médical, en plus de permettre le profilage et la ségrégation sociale associée à une tare ou un handicap, préjugé social manifeste lié au système;
✔ la décision est disproportionnée et abusive, même si elle se réfère au C.S.R., en cause du droit applicable en pareille situation factuelle et juridique ailleurs au Canada;
✔ la SAAQ peut permettre cet accommodement raisonnable en vertu de la loi sur la Société qui confère ce pouvoir et ce devoir à son article 2, 2° e) et ce pouvoir discrétionnaire peut être mis en exercice par le TAQ
✔ pour tout autre motif soumis lors de cette audience et jugé pertinent ou valable par cette Cour;
✔ la décision SAAQ est déraisonnable parce que non basée sur les faits et non justifiée par le droit;
✔ parce que le requérant a présenté à la SAAQ plusieurs conditions – contraintes – alternatives et palliatives existantes pour remplacer l'utilisation d'Alco-Lock comme : tolérance alcool 0, contrôle routier en tout temps par SQ avec système électromagnétique de la SAAQ, bracelet électronique ou autre, contrainte que [nom du requérant] était prêt à accepter en remplacement de l'Alco-Lock pour motifs de santé et de sécurité, soulevé par son médecin personnel;
✔ parce que l'obligation pour le requérant de faire le programme Alco-Lock, comme démontré lors de l'audience, en provoquant chez lui des séquelles physiques, psychologiques, morales, sociales et familiales sévères et graves.
2. Mettre fin au programme évaluation ACRDQ.
POUR MOTIFS :
✔ parce que le dossier du conducteur requérant ne le justifie pas et les faits pertinents conduisant à cette conclusion sont inscrits dans les dossiers de la SAAQ; et dans son dossier civil, professionnel et criminel, aucun dossier d'alcool ni au civil ni au criminel autre que cette première infraction;
✔ une première évaluation démontrait clairement que le requérant n'a jamais eu et n'a pas de problème de comportement de conduite sous l'effet de l'alcool depuis 56 ans qu'il détient un permis;
✔ l'obligation de suivre ce programme RCRDQ constitue une ignorance aveugle des faits au dossier administratif, civil et criminel du conducteur requérant Savard, tel que démontré lors de l'audience;
La SAAQ devrait apprécier tous les faits et non pas seulement une partie (soit la seule première infraction sur 56 ans de conduite);
✔ En appréciant tous les faits, tout le dossier du citoyen et administré Christian Savard, il y a « prépondérances des probabilités » que le requérant n'a aucun problème avec l'alcool et encore moins avec l'alcool au volant;
— que le requérant n'est pas et ne sera pas un récidiviste,;
Cette première infraction est un événement isolé et accidentel dans sa vie de conducteur depuis plus de 56 ans;
✔ Décision illégale en droit administratif parce que non fondée sur les faits et la prépondérance.
Avec respect,
[Nom du requérant] »
[6] Le 22 septembre 2011, dans le cadre d’un accident de la route, le requérant présente une alcoolémie supérieure à 160 mg d’alcool par 100 ml de sang.
[7] Au terme d’un procès, le 21 février 2013, il est reconnu coupable d’une infraction prévue à l’article 253(1)b) du Code criminel, soit d’avoir conduit un véhicule routier alors que son alcoolémie était supérieure à 160 mg d’alcool par 100 ml de sang.
[8] Conséquemment, le 25 février 2013, l’intimée informe le requérant qu’il sera admissible à l’obtention d’un nouveau permis le 21 février 2016, mais aussi que puisqu’il s’agit d’une première sanction au cours des dix dernières années pour une infraction au Code criminel liée à l’alcool, le requérant devra d’abord satisfaire à certaines conditions qui lui seront transmises douze mois avant cette date.
[9] Suivant le Code de la sécurité routière (CSR), en conséquence directe de la déclaration de culpabilité précitée, le permis de conduire du requérant a été révoqué de plein droit et il est de facto devenu inadmissible à un nouveau permis avant l’expiration d’une période de trois ans et moyennant la réussite d’une évaluation complète, et ce, conformément aux articles 76.1.4, 76.1.7 et 180 du Code de la sécurité routière pour une infraction reliée à une alcoolémie élevée.
[10] Le 18 février 2014, la Cour supérieure rejette l’appel de la déclaration de culpabilité prononcée le 21 février 2013.
[11] Le 14 mai 2014, l’intimée délivre un permis restreint au requérant, valide jusqu’au 3 février 2017, lequel l’autorise à conduire un véhicule muni d’un antidémarreur éthylométrique.
[12] Le 27 octobre 2014, le requérant retire volontairement l’antidémarreur sur son véhicule, contrevenant ainsi aux conditions d’utilisation associées à son permis restreint.
[13] Conséquemment, le 6 novembre 2014, en application de l’article 187.3 du Code de la sécurité routière, le permis restreint du requérant est révoqué sur le champ.
[14] En novembre 2014, le requérant fait part à l’intimée de son incapacité à conduire avec l’antidémarreur en raison de l’anxiété et du stress que cela lui occasionne. Le 2 décembre 2014, un rapport médical complété par la Dre Linda Turmel est communiqué à l’intimée, dans lequel on lit que l’état de santé du requérant ne présente aucun problème.
[15] Le 16 février 2015, dans le but de se prévaloir de l’article 76.1.12 du CSR, le requérant, cherchant l’obtention d’une exemption de l’antidémarreur, transmet à l’intimée une note complétée par la Dre Turmel ainsi que le rapport du 2 décembre 2014.
[16] Le 10 mars 2015, l’intimée rejette la demande de révision.
[17] Le requérant s’adressera ensuite à la Cour supérieure en demandant la révision judiciaire de trois décisions de l’intimée, rendues les 27 février, 18 mars et 6 novembre 2014.
[18] Le 20 mai 2015, la Cour supérieure, sous la présidence de l’Honorable Michèle Lacroix, J.C.S., rejette la requête en révision judiciaire dans une décision de neuf pages qui est reproduite au dossier[1].
[19] Profondément convaincu qu’il est en droit d’être exempté de l’utilisation de l’antidémarreur éthylométrique, le requérant s’adressera à nouveau à l’intimée et demandera une réévaluation, reconsidération et/ou révision de son dossier, ce qui donnera lieu à la décision contestée et précitée en date du 26 avril 2016.
[20] À l’audience, le requérant témoigne et, pour l’essentiel, reprend les représentations et il considère avoir été mal traité et mal informé par l’intimée.
[21] Âgé de 73 ans, et titulaire d’un baccalauréat en droit, le requérant s’exprime avec aisance et fait valoir son point de vue pleinement et longuement devant le Tribunal.
[22] Il estime qu’il ne s’agit pas ici d’une question juridique, mais bien de plusieurs fautes juridiques et factuelles importantes.
[23] Il évoque avoir été victime d’une erreur judiciaire en ce qu’il n’aurait jamais dû être condamné comme il l’a été, quoiqu’il reconnaisse que le volet criminel de son dossier est aujourd’hui cristallisé par une décision finale à la suite du rejet de son appel.
[24] Pour lui, il y a une nette disproportion entre la décision rendue et la faute unique qu’il a commise, s’appuyant principalement sur son parcours professionnel exemplaire ainsi que sur son dossier de conducteur qui, quoique présentant certaines infractions mineures, ne présente aucun écart de conduite quant à la conduite sécuritaire d’un véhicule automobile en lien avec la consommation d’alcool.
[25] Puis, il plaide que le traitement qui lui est réservé est un traitement que l’on pourrait qualifier de cruel et inusité, que tout cela lui a coûté très cher et qu’au final le système d’antidémarreur éthylométrique est dysfonctionnel.
[26] Il ajoute qu’il avait, au moment de l’infraction, un véhicule neuf qui est depuis stationné dans son entrée.
[27] Il objecte que les faits prouvent que le programme ne fonctionne pas. Il produit un document réalisé par lui-même évoquant que l’ensemble des désagréments a eu un impact financier de l’ordre de 25 000 $ pour lui.
[28] Selon lui, les contingences sont tout simplement trop lourdes. À un point donné, il devient émotif et évoque avoir eu des idées noires en lien avec l’imposition d’un antidémarreur éthylométrique, évoquant un sentiment de honte qu’il l’habitait.
[29] Puis, il explique que selon lui, toute la procédure suivie par l’intimée ne découle pas de l’application de la Loi, mais bien d’un vice de procédure en violation de son droit d’être entendu.
[30] Il évoque plusieurs autres moyens plus efficaces que le système d’antidémarreur éthylométrique et offre même de remplacer cette exigence par une peine de détention qu’il se dirait prêt à purger afin d’éviter de munir son véhicule d’un antidémarreur éthylométrique.
[31] Il plaide que les ratées du système d’antidémarreur éthylométrique le rendent dysfonctionnel et argumente longuement sur l’inaction de l’intimée quant à ses diverses offres de régler le contentieux tel que, selon lui, le permet la Loi sur l’assurance automobile du Québec.
[32] Il évoque les diverses contestations judiciaires qu’il a pilotées en lien avec son dossier, dont notamment la requête en révision judiciaire et l’appel de sa déclaration de culpabilité, arguant que toute cette saga a brisé sa fin de vie. Il accuse l’intimée de lui avoir ruiné les quelques années qui lui restent à vivre.
[33] Selon lui, de toute façon, le résultat de cet acharnement de l’intimée sera simplement une augmentation du nombre de conducteurs conduisant sans permis de conduire.
[34] Néanmoins, on apprend lors de l’audience que depuis deux mois, il participe à une évaluation complète en vue d’obtenir une recommandation.
[35] Quant à la question de sa consommation d’alcool, il nie toute problématique reliée à la consommation et invite le Tribunal à l’envoyer en cure si celui-ci considère qu’il a un tel problème d’alcool, ce qui selon lui est la seule façon d’adresser cette problématique, plaidant en cela que le cadre instauré par le législateur ne vise aucunement à éviter que des récidivistes de l’alcool au volant circulent sur les routes du Québec.
[36] Puis, il plaide longuement sur la théorie de l’accommodement raisonnable, arguant que l’intimée eut dû l’accommoder, notamment en acceptant l’une des alternatives contraignantes qu’il évoquait dans sa requête introductive d’instance.
[37] Il explique que sa vie est un enfer depuis qu’il a été reconnu coupable de conduite avec plus de 160 mg d’alcool par 100 ml de sang.
[38] Malgré qu’il reconnaisse que le Code de la sécurité routière est une Loi d’ordre public, il estime que le traitement dont il a fait l’objet est trop sévère, au point de devenir déraisonnable et que la mesure imposée est disproportionnée eu égard à l’acte et à la peine infligée par la Cour criminelle, rappelant que devant la Cour criminelle, il s’est vu imposer une interdiction de conduire d’un an qui s’est transposée en une interdiction qu’il qualifie de cinq ans par le cumul des diverses obligations découlant de l’application des dispositions du Code de la sécurité routière.
[39] Il se dit prêt à accepter n’importe quelle contrainte encore plus sévère que celle qui lui est imposée dans le but de se voir exempter l’obligation de conduire un véhicule muni d’un antidémarreur éthylométrique, puisque selon lui, la simple présence de ce dispositif entraîne chez lui une anxiété et un stress insupportable qui justifierait le Tribunal d’intervenir pour l’en exempter.
[40] Pour l’essentiel, il opine que son médecin traitant est d’accord avec lui qu’il ne devrait pas utiliser l’antidémarreur éthylométrique et à son âge, il se sent humilié socialement en raison de l’opprobre social associé au fait de devoir souffler dans l’appareil. Il termine en reprochant la lourdeur du système et que le cadre mis en place par le législateur entraîne chez les conducteurs fautifs une ruine économique et sociale.
[41] De son côté, la procureure de l’intimée plaide que le Tribunal n’a pas compétence pour entendre le recours.
[42] Qu’en est-il ?
[43] Le Code de la sécurité routière[2] édicte notamment ce qui suit :
« 180. Entraîne de plein droit la révocation de tout permis autorisant la conduite d'un véhicule routier ou la suspension du droit d'en obtenir un, la déclaration de culpabilité d'une personne à une infraction au Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46), commise avec un véhicule routier ou avec un véhicule hors route et prévue aux articles suivants de ce code:
1 les articles 220, 221, 236, le sous-paragraphe a du paragraphe 1, les paragraphes 3 ou 4 de l'article 249, les articles 249.1, 249.2, 249.3, les paragraphes 1, 3 ou 4 de l'article 249.4 ou les paragraphes 1, 1.2 ou 1.3 de l'article 252;
2°l'article 253, le paragraphe 5 de l'article 254 ou les paragraphes 2, 2.1, 2.2, 3, 3.1 ou 3.2 de l'article 255.
Le juge qui prononce la déclaration de culpabilité doit ordonner la confiscation du permis visé au premier alinéa pour qu'il soit remis à la Société. »
[44] L’article 253 du Code criminel édicte :
« 253. (1) Commet une infraction quiconque conduit un véhicule à moteur, un bateau, un aéronef ou du matériel ferroviaire, ou aide à conduire un aéronef ou du matériel ferroviaire, ou a la garde ou le contrôle d’un véhicule à moteur, d’un bateau, d’un aéronef ou de matériel ferroviaire, que ceux-ci soient en mouvement ou non, dans les cas suivants :
a) lorsque sa capacité de conduire ce véhicule, ce bateau, cet aéronef ou ce matériel ferroviaire est affaiblie par l’effet de l’alcool ou d’une drogue;
b) lorsqu’il a consommé une quantité d’alcool telle que son alcoolémie dépasse quatre-vingts milligrammes d’alcool par cent millilitres de sang.
(2) Il est entendu que l’alinéa (1)a) vise notamment le cas où la capacité de conduire est affaiblie par l’effet combiné de l’alcool et d’une drogue. »
[45] Voici les autres dispositions pertinentes du Code de la sécurité routière :
« 76. Sous réserve de l'article 76.1.1, aucun permis ne peut être délivré à une personne dont le permis a été révoqué ou dont le droit d'en obtenir un a été suspendu à la suite d'une déclaration de culpabilité pour une infraction au Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46), visée à l'article 180 du présent code, avant l'expiration d'une période d'une, de trois ou de cinq années consécutives à la date de la révocation ou de la suspension selon que, au cours des 10 années précédant cette révocation ou cette suspension, elle s'est vu imposer aucune, une seule ou plus d'une révocation ou suspension en vertu de cet article.
Si la déclaration de culpabilité est suivie d'une ordonnance d'interdiction de conduire prononcée en vertu des paragraphes 1, 2 et 3.1 à 3.4 de l'article 259 du Code criminel pour une période plus longue que celle applicable en vertu du premier alinéa, la période alors applicable sera égale à celle établie dans l'ordonnance.
[…]
76.1.1. Dès l'expiration de l'ordonnance d'interdiction de conduire visée au deuxième alinéa de l'article 76 ou, à moins d'une ordonnance contraire, dès l'expiration de la période minimale d'interdiction absolue visée au Code criminel, la personne dont l'infraction donnant lieu à la révocation ou à la suspension est reliée à l'alcool, à une alcoolémie élevée ou au refus de fournir un échantillon d'haleine peut être autorisée, moyennant l'obtention d'un permis restreint, à conduire un véhicule routier mais uniquement si le véhicule est muni d'un antidémarreur éthylométrique agréé par la Société.
76.1.2. Lorsque l'infraction donnant lieu à la révocation ou à la suspension est reliée à l'alcool et que la personne n'est pas visée à l'article 76.1.4, elle doit, pour obtenir un nouveau permis, établir que son rapport à l'alcool ou aux drogues ne compromet pas la conduite sécuritaire d'un véhicule routier de la classe de permis demandée.
La personne doit satisfaire à l'exigence prévue au premier alinéa:
1°au moyen d'une évaluation sommaire, si, au cours des 10 années précédant la révocation ou la suspension, elle ne s'est vu imposer ni révocation ni suspension pour une infraction consistant à refuser de fournir un échantillon d'haleine ou pour une infraction reliée à l'alcool;
2°au moyen d'une évaluation complète, si, au cours des 10 années précédant la révocation ou la suspension, elle s'est vu imposer au moins une révocation ou suspension pour une infraction consistant à refuser de fournir un échantillon d'haleine ou pour une infraction reliée à l'alcool.
La personne qui échoue l'évaluation sommaire doit satisfaire à l'exigence prévue au premier alinéa au moyen d'une évaluation complète.
La personne qui réussit l'évaluation sommaire doit, après avoir payé à la Société les droits afférents, suivre avec succès un programme d'éducation reconnu par le ministre des Transports et destiné à sensibiliser les conducteurs aux problèmes de la consommation d'alcool ou de drogue.
76.1.3. Le nouveau permis, délivré à une personne visée à l'article 76.1.2 qui réussit l'évaluation complète ou l'évaluation du maintien des acquis prévue à l'article 76.1.4.1, est assorti de la condition de conduire un véhicule routier muni d'un antidémarreur éthylométrique agréé par la Société durant une période d'une ou de deux années selon que, au cours des 10 années précédant la révocation ou la suspension, la personne s'est vu imposer aucune ou une seule révocation ou suspension pour une infraction reliée à l'alcool, à une alcoolémie élevée ou au refus de fournir un échantillon d'haleine.
76.1.4. Lorsque l'infraction donnant lieu à la révocation ou à la suspension est reliée au refus de fournir un échantillon d'haleine ou à une alcoolémie élevée, les périodes de sanction d'une année et de trois années, prévues au premier alinéa de l'article 76, sont prolongées de deux années et la personne doit, pour obtenir un nouveau permis, établir, au moyen d'une évaluation complète, que son rapport à l'alcool ou aux drogues ne compromet pas la conduite sécuritaire d'un véhicule routier de la classe de permis demandée.
76.1.4.1. Pour l'obtention d'un nouveau permis, une personne est dispensée de l'évaluation complète prévue aux articles 76.1.2 et 76.1.4 si, entre la commission de l'infraction et la déclaration de culpabilité, elle établit au moyen d'une évaluation de sa santé en application des dispositions de l'article 73 et du paragraphe 4° de l'article 109 que son rapport à l'alcool ou aux drogues ne compromet pas la conduite sécuritaire d'un véhicule routier de la classe de permis dont elle est titulaire. Elle doit toutefois se soumettre à une évaluation permettant de vérifier si les acquis relatifs à son rapport à l'alcool ou aux drogues se sont maintenus.
L'évaluation de la santé qui n'est pas complétée à la date de la déclaration de culpabilité peut être poursuivie après cette date afin d'obtenir la dispense prévue au premier alinéa.
La personne qui échoue l'évaluation du maintien des acquis prévue au premier alinéa doit se soumettre à l'évaluation complète prévue aux articles 76.1.2 et 76.1.4.
76.1.5. Le nouveau permis, délivré à une personne visée à l'article 76.1.4 qui réussit l'évaluation complète ou l'évaluation du maintien des acquis prévue à l'article 76.1.4.1, est assorti de la condition de conduire un véhicule routier muni d'un antidémarreur éthylométrique agréé par la Société durant une période de deux ou de trois années selon que, au cours des 10 années précédant la révocation ou la suspension, la personne n'a fait l'objet d'aucune révocation ou suspension pour une infraction reliée à l'alcool ou à une alcoolémie élevée ou a fait l'objet d'une seule révocation ou une seule suspension pour une infraction reliée à l'alcool.
76.1.6. Le nouveau permis et tout permis subséquent délivré au cours de la vie de la personne est assorti de la condition de conduire un véhicule routier muni d'un antidémarreur éthylométrique agréé par la Société, lorsque l'infraction donnant lieu à la révocation ou à la suspension:
1°est reliée à l'alcool et qu'au cours des 10 années précédant la révocation ou la suspension, la personne a fait l'objet:
a) soit de plus d'une révocation ou suspension pour une infraction reliée à l'alcool;
b) soit d'une révocation ou d'une suspension pour une infraction reliée à l'alcool et d'une révocation ou suspension pour une infraction reliée à une alcoolémie élevée ou au refus de fournir un échantillon d'haleine;
2°est reliée à une alcoolémie élevée ou au refus de fournir un échantillon d'haleine et qu'au cours des 10 années précédant la révocation ou la suspension, la personne a fait l'objet:
a) soit de plus d'une révocation ou suspension pour une infraction reliée à l'alcool;
b) soit d'une révocation ou d'une suspension pour une infraction reliée à une alcoolémie élevée ou au refus de fournir un échantillon d'haleine.
76.1.7. Pour l'application des articles 76.1 à 76.1.6, on entend par:
1°« une infraction consistant à fuir un véhicule de police» toute infraction à l'article 249.1 du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46);
2°« une infraction consistant à fuir le lieu d'un accident» toute infraction aux paragraphes 1, 1.2 ou 1.3 de l'article 252 du Code criminel;
3°« le refus de fournir un échantillon d'haleine» toute infraction au paragraphe 5 de l'article 254 ou aux paragraphes 2.2 ou 3.2 de l'article 255 du Code criminel;
4°« une infraction reliée à l'alcool» une infraction à l'article 253 ou au paragraphe 2, 2.1, 3 ou 3.1 de l'article 255 du Code criminel pour laquelle aucune décision d'un tribunal ne fait état que la concentration d'alcool dans le sang du contrevenant au moment où l'infraction a été commise était supérieure à 160 mg d'alcool par 100 ml de sang;
5°« une infraction reliée à une alcoolémie élevée» une infraction à l'article 253 ou au paragraphe 2, 2.1, 3 ou 3.1 de l'article 255 du Code criminel pour laquelle une décision d'un tribunal fait état que la concentration d'alcool dans le sang du contrevenant au moment où l'infraction a été commise était supérieure à 160 mg d'alcool par 100 ml de sang.
[…]
76.1.12. Lorsque des raisons médicales exceptionnelles le justifient, la Société peut exempter une personne de l’obligation prévue aux articles 76.1.3, 76.1.5 et 76.1.6 de munir le véhicule qu’elle conduit d’un antidémarreur éthylométrique. Il est alors interdit à cette personne de conduire un véhicule ou d’en avoir la garde ou le contrôle s’il y a quelque présence d’alcool dans son organisme. La Société peut exiger qu’elle lui fournisse les renseignements et documents sur son rapport à l’alcool.
[…]
83. La Société doit refuser de délivrer un permis, d'en changer la classe ou de lui en ajouter une autre, si la personne qui en fait la demande:
[…]
4° ne satisfait pas aux conditions et aux formalités visées aux articles 76 à 76.1.12, 80.1, 185 et 191.2;
[…]
560. Peut être contestée devant le Tribunal administratif du Québec :
1° une décision prise par la Société en vertu des paragraphes 1°, 2° et 3° de l'article 81, des paragraphes 1° et 2° de l'article 82, du paragraphe 2° de l'article 83, des paragraphes 1°, 2° et 3° de l'article 190 ou de l'article 191 ou une décision de la Société refusant de réviser une telle décision ou la maintenant;
2° une décision prise par la Société en vertu du paragraphe 3° de l'article 82 ou de l'un des articles 162, 207, 538.0.1 ou du deuxième alinéa de l'article 543.3.2 ou une décision de la Société refusant de réviser une telle décision ou la maintenant. »
[46] Le législateur a mis en place, par le biais des articles précités, un encadrement sévère concernant les conducteurs qui font l’objet d’une révocation en lien avec une alcoolémie élevée, comme le requérant en l’espèce.
[47] Manifestement, le requérant refuse de comprendre le cadre légal dans lequel il évolue.
[48] L’intimée doit refuser la délivrance d’un permis si les conditions ne sont pas satisfaites, tel que prévu au 4e paragraphe de l’article 83 précité.
[49] Dans la mesure où ce paragraphe de l’article 83 ne fait pas partie de la liste prévue à l’article 560, le Tribunal n’a pas compétence pour intervenir.
[50] Malgré que cet argument soit suffisant, il convient que même si le Tribunal avait compétence, le recours serait rejeté.
[51] En effet, le Tribunal constate que le requérant n’a pas établi, à la satisfaction de l’intimée, au moyen d’une évaluation complète faite par une personne autorisée, que son rapport à l’alcool ou aux drogues ne compromet pas la conduite sécuritaire d’un véhicule routier et qu’en conséquence, l’intimée devait refuser l’émission d’un permis au requérant.
[52] Le Code de la sécurité routière est d’ordre public.
[53] Les dispositions précitées sont claires, pour obtenir à nouveau son permis, le requérant doit se soumettre à une évaluation complète.
[54] Les inconvénients causés à une personne en raison de la suspension de son permis, même majeurs, ne sont pas pertinents.
[55] Il en est de même des récriminations du requérant à l’égard du refus de l’intimée de lui substituer une quelconque contrainte en remplacement de l’obligation est prévue expressément dans les dispositions précitées du Code de la sécurité routière.
[56] Le requérant a vu son permis révoqué et la seule possibilité qu’il a est d’obtenir un permis restreint, mais pour ce faire, il doit accepter que son véhicule soit muni d’un antidémarreur éthylométrique, l’intimée, et à plus forte raison le Tribunal, ne peut octroyer d’exemption à ce niveau.
[57] L’évaluation complète à laquelle s’assujettit désormais le requérant permettra de valider le sentiment que le requérant évoquait à l’audience à l’effet que son comportement envers l’alcool ne présente pas de risque pour la conduite sécuritaire d’un véhicule routier.
POUR CES MOTIFS, le Tribunal[3] :
DÉCLINE compétence et;
REJETTE le recours.







CARL LECLERC, j.a.t.a.q.




Dussault, Mayrand

Me Sophie Morin

Procureure de la partie intimée





[1] Pages 27 à 35 du dossier administratif.
[2] RLRQ, chapitre C-24.2.
[3] Le Tribunal a autorisé une réduction du quorum à un seul membre, par ordonnance rendue en vertu de l’article 82, alinéa 3 de la Loi sur la justice administrative.