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Comeau c. Couture

no. de référence : 2016 QCCA 1134


Comeau c. Couture
2016 QCCA 1134

COUR D'APPEL

CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
GREFFE DE QUÉBEC

No :
200-09-008925-155

(200-17-018357-137)


PROCÈS-VERBAL D'AUDIENCE


DATE :
6 juillet 2016

CORAM : LES HONORABLES
JEAN BOUCHARD, J.C.A. (JB3398)
DOMINIQUE BÉLANGER, J.C.A. (JB1988)
JEAN-FRANÇOIS ÉMOND, J.C.A. (JE0144)

PARTIE APPELANTE

AVOCAT


JEAN-RENÉ COMEAU


Me MICHEL POULIOT (ABSENT)

PARTIE INTIMÉE

AVOCAT


DANIELLE COUTURE


Me STÉPHANE NOBERT (ABSENT)
(Lex Operandi services juridiques inc.)


En appel d'un jugement rendu le 9 janvier 2015 par l'honorable Suzanne Hardy-Lemieux de la Cour supérieure, district de Québec.


NATURE DE L'APPEL :

Prêt – Prescription

Greffière : Marie-Ann Baron (TB3964)
Salle : 4.33




AUDITION


09 h 36
Continuation de l’audience du 5 juillet 2016;

Arrêt.



(s)
Greffière audiencière


PAR LA COUR


ARRÊT


[1] L’appelant se pourvoit contre un jugement rendu le 9 janvier 2015 par la Cour supérieure, district de Québec (l’honorable Suzanne Hardy-Lemieux) qui a rejeté, parce que prescrit, son recours visant à obtenir le remboursement d’un prêt de 160 000 $ qu’il a consenti à l’intimée[1].
* * *
[2] Les faits sont correctement rappelés par la juge de première instance[2]. Aussi, suffira-t-il de rappeler qu’en mars 2008, l’appelant signe en faveur de l’intimée deux chèques totalisant la somme de 160 000 $ (125 000 $ + 35 000 $) afin qu’elle puisse racheter la part indivise de son conjoint dans la résidence à la suite de leur séparation. Puisque ce sont des amis et qu’il a entièrement confiance en elle, aucun autre document n’est signé pour officialiser ce prêt. Près de trois ans et demi plus tard, soit le 16 août 2011, dans un courriel adressé à l’intimée, l’appelant lui rappelle l’existence de son prêt et s’inquiète de ne pas être remboursé « si par malheur un imprévu arrivait. »
[3] Le 29 août suivant, l’intimée lui répond par écrit qu’il est « bien certain » qu’elle le rembourserait s’il lui en faisait la demande. Elle lui précise toutefois qu’elle devra alors vendre sa maison devant l’impossibilité pour elle « de trouver un aussi gros montant (…) ». Le 31 août, l’appelant lui écrit que « nous en reparlerons verbalement. »
[4] À compter du 23 mars 2012, l’appelant se fait plus insistant. Il tente sans succès de rejoindre l’intimée au téléphone. Il lui expédie également plusieurs courriels qui demeurent tous sans réponse. Cette dernière ayant consulté un avocat, c’est lui, apparemment, qui lui dicte cette ligne de conduite.
[5] Le 12 février 2013, voilà maintenant près de cinq ans que l’appelant a prêté à l’intimée la somme de 160 000 $. De guerre lasse, il lui intime de le rembourser. Une mise en demeure formelle suit quelque temps après à laquelle l’intimée, le 16 avril 2013, par l’entremise de son avocat, répond ne rien lui devoir parce que la somme avancée serait une donation et non un prêt.
[6] Finalement, c’est le 17 mai 2013 que l’appelant poursuit l’intimée afin d’obtenir le remboursement de ce qui lui est dû.
* * *
[7] La juge de première instance a rejeté le recours de l’appelant après avoir conclu que le droit au remboursement de ce dernier était prescrit, plus de trois ans[3] s’étant écoulés entre le moment où le prêt a été fait, en mars 2008, et l’institution des procédures en mai 2013[4].
[8] Quant à l’argument de l’appelant selon lequel l’intimée a renoncé à la prescription dans son courriel du 29 août 2011[5], la juge se dit incapable de voir dans cet écrit une renonciation claire et sans équivoque[6].
[9] Compte tenu de la conclusion à laquelle elle en arrive, la juge mentionne qu’il n’est pas nécessaire d’examiner l’argument de la donation soulevé par l’intimée[7].
* * *
[10] La logique commandait ici que la juge détermine tout d’abord s’il s’agissait d’un prêt ou d’une donation. Or, en procédant à l’envers et en prenant pour acquis qu’elle était en présence d’un prêt, la juge a passé à côté d’un élément important qui a forcément biaisé son analyse : le peu de crédibilité à accorder à l’intimée qui soutenait que l’appelant lui a donné 160 000 $ alors qu’elle reconnait dans ses propres écrits qu’il s’agissait bel et bien d’un prêt.
[11] La seconde erreur de la juge est d’avoir conclu qu’elle était en présence d’un prêt à demande alors que la preuve, les circonstances et la nature de l’obligation contractée par l’intimée auraient dû lui faire conclure, de manière inéluctable, que cette dernière bénéficiait d’un terme indéterminé[8], avec pour conséquence que la prescription ne pouvait pas commencer à courir au moment du prêt en mars 2008.
[12] En bref, la juge de première instance aurait dû déterminer le terme d’exigibilité de la dette contractée par l’intimée, comme le lui demandait l’appelant dans sa requête introductive d’instance amendée, au 16 avril 2013, date où l’intimée, par l’entremise de son avocat, déclare ne rien lui devoir parce que la somme avancée serait une donation. À cette date, il était en effet devenu certain qu’il n’était pas dans l’intention de l’intimée de rembourser l’appelant.
[13] Au moment de l’introduction du recours entrepris par l’appelant, le 17 mai 2013, le remboursement du prêt était donc clairement exigible.
POUR CES MOTIFS, LA COUR :
[14] ACCUEILLE l’appel;
[15] INFIRME le jugement de première instance;
[16] CONDAMNE l’intimée à payer à l’appelant la somme de 160 000 $ avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter du 16 avril 2013;
[17] LE TOUT avec les frais de justice.





JEAN BOUCHARD, J.C.A.



DOMINIQUE BÉLANGER, J.C.A.



JEAN-FRANÇOIS ÉMOND, J.C.A.