Consultation rapide avec un avocat

1-877-MES-DROITS
1-877-637-3764

Services juridiques au Québec

Visitez notre page Facebook pour être au courant de nos chroniques et capsules! Aussi, possibilité d'obtenir une consultation rapide par la messagerie Facebook (messenger).

Zoungrana c. Air Algérie

no. de référence : 500-06-000746-152

Zoungrana c. Air Algérie
2016 QCCS 2311
JH5439

COUR SUPÉRIEURE
(Action collective)
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE
MONTRÉAL

N° :
500-06-000746-152

DATE :
18 mai 2016


______________________________________________________________________

SOUS LA PRÉSIDENCE DE :
L’HONORABLE
STEPHEN W. HAMILTON, J.C.S.
______________________________________________________________________


MAMADOU ZOUNGRANA
Demandeur
c.
AIR ALGÉRIE
Défenderesse


______________________________________________________________________

JUGEMENT
______________________________________________________________________

INTRODUCTION

[1] Le demandeur recherche l’autorisation d’exercer une action collective. Il plaide que le Tribunal peut inclure dans le groupe des personnes qui ne pourraient pas saisir les tribunaux québécois de leurs réclamations individuelles contre la défenderesse. Il plaide de façon subsidiaire que les tribunaux québécois peuvent prendre compétence sur les réclamations de ces personnes en vertu de l’article 3136 du Code civil du Québec. La défenderesse s’oppose à l’inclusion dans le groupe de ces personnes et dépose une demande en exception déclinatoire.

[2] Une fois la question de compétence réglée, le Tribunal fera l’analyse des quatre critères énumérés à l’article 575 du Code de procédure civile pour déterminer s’il est approprié d’autoriser une action collective.

CONTEXTE

1. Les faits

[3] Le 24 juillet 2014, le vol Air Algérie AH5017 en provenance d’Ouagadougou, Burkina Faso avec destination Alger, Algérie s’écrase au Mali. Les 108 passagers[1] et les membres de l’équipage perdent tous leur vie.

[4] Le demandeur Mamadou Zoungrana est originaire du Burkina Faso et résident permanent canadien depuis 2012. Il parraine avec succès son épouse et leurs deux fils en 2013. Le 6 juillet 2014, il leur achète sur internet des billets d’avion pour qu’ils le rejoignent au Canada le 24 juillet 2014[2]. La première partie de ce vol est le vol AH5017 et la deuxième partie est un vol Air Algérie d’Alger vers Montréal (vol AH2700). L’épouse et les deux fils de M. Zoungrana décèdent dans l’accident.

[5] Selon une liste établie par la police spéciale de l’aéroport international d’Ouagadougou, les 108 passagers viennent des pays suivants : France (53), Burkina Faso (26), Canada (6), Liban (6), Algérie (4), Allemagne (4), Luxembourg (2), Belgique (1), Cameroun (1), Égypte (1), Mali (1), Nigéria (1), Suisse (1) et Grande-Bretagne (1)[3].

[6] Après l’accident, les familles des passagers du vol AH5017 se sont organisées pour se donner une entraide, pour obtenir des informations au sujet de l’accident et pour poursuivre leurs réclamations contre Air Algérie et d’autres défenderesses possibles.

[7] Le 4 août 2014, l’Association des Familles Victimes du Crash AH5017 de la Compagnie Air Algérie est créée à Ouagadougou[4]. L’association regroupe surtout les familles burkinaises. M. Zoungrana est à Ouagadougou le 4 août 2014 et il participe à la première assemblée de l’association. Il demeure membre de l’association par la suite et il demeure en contact avec l’association et certaines familles burkinaises.

[8] À la même époque, l’Association AH5017 – Ensemble est créée en France. Cette association regroupe principalement les familles françaises. M. Zoungrana a peu de contact avec l’association française ou les familles françaises.

[9] La plupart des familles, soit par les associations ou directement, retiennent des avocats dans différents pays[5]. M. Zoungrana et trois autres familles canadiennes retiennent les services de Me Samet.

[10] Le résultat est qu’il y a plusieurs groupes de familles. Il semble y avoir peu de coordination entre eux.

[11] Air Algérie paie l’indemnisation d’urgence à M. Zoungrana en février 2015. Il croit que les autres familles burkinaises reçoivent l’indemnisation d’urgence à la même période.

[12] L’association française et les familles des passagers français interviennent comme parties civiles dans les procédures pénales en France afin d’obtenir des informations sur l’enquête. M. Zoungrana et des familles de passagers qui ne sont pas français font aussi des demandes pour intervenir mais leurs demandes sont refusées parce que le tribunal français n’est compétent pour instruire des faits commis à l’étranger que s’ils sont commis au préjudice de ressortissants français[6].

[13] À part la présente demande d’autorisation, il n’y a aucune procédure civile contre Air Algérie dans aucun pays. Certains groupes négocient avec Air Algérie et l’avancement des négociations varie. Le délai de prescription est de deux ans et il y a donc une certaine urgence à conclure un règlement ou à déposer des procédures civiles.

[14] Dans ce contexte, M. Zoungrana dépose la présente procédure le 30 juin 2015.

[15] Trois autres familles canadiennes participent avec M. Zoungrana aux réunions avec Me Samet. De plus, M. Zoungrana est en contact avec le secrétaire général de l’association burkinaise et plusieurs familles au Burkina Faso ainsi que quelques personnes en France et il les tient informés de ses démarches[7]. Lors du premier anniversaire du crash, M. Zoungrana est à une cérémonie au Burkina Faso regroupant plus de 100 membres de familles des passagers et il leur parle de l’action collective. Me Samet est aussi en communication avec certains des autres avocats dans les autres pays[8].

[16] Certains appuient les démarches de M. Zoungrana[9]. D’autres attendent voir s’ils seront inclus dans l’action collective[10]. Un groupe de 243 membres des familles de 52 passagers représenté par des avocats français refuse d’être associé de près ou de loin à l’action collective au Québec[11]. Il y aurait aussi un avocat espagnol qui exprime son désaccord avec l’action collective au Québec.

2. Le contexte juridique

a. Convention de Varsovie, Convention de Montréal et Loi sur le transport aérien

[17] Deux conventions internationales régissent la responsabilité du transporteur dans le cas du décès d’un passager lors d’un transport aérien international, la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international conclue à Varsovie en 1929 telle qu’amendée (la Convention de Varsovie) et la Convention pour l’unification de certaines règles relatives au transport aérien international conclue à Montréal en 1999 (la Convention de Montréal).

[18] La Convention de Montréal est destinée à supplanter la Convention de Varsovie. Toutefois, la Convention de Varsovie demeure pertinente parce que certains pays qui ont signé la Convention de Varsovie n’ont pas encore signé la Convention de Montréal. Le Canada a signé les deux conventions et elles font partie du droit canadien en vertu de la Loi sur le transport aérien[12].

[19] Les principales différences entre la Convention de Varsovie et la Convention de Montréal qui sont pertinentes au présent litige sont les suivantes :

• La Convention de Montréal ajoute une juridiction compétente, soit le tribunal du lieu de la résidence principale et permanente du passager décédé;

• La Convention de Montréal augmente l’indemnisation sans faute payable par le transporteur; et

• La Convention de Montréal crée une présomption de faute contre le transporteur.

[20] Le champ d’application de la Convention de Montréal est défini comme suit aux deux premiers paragraphes de l’article 1 de la Convention :

Article 1 — Champ d'application

1 La présente convention s'applique à tout transport international de personnes, bagages ou marchandises, effectué par aéronef contre rémunération. Elle s'applique également aux transports gratuits effectués par aéronef par une entreprise de transport aérien.

2 Au sens de la présente convention, l'expression transport international s'entend de tout transport dans lequel, d'après les stipulations des parties, le point de départ et le point de destination, qu'il y ait ou non interruption de transport ou transbordement, sont situés soit sur le territoire de deux États parties, soit sur le territoire d'un seul État partie si une escale est prévue sur le territoire d'un autre État, même si cet État n'est pas un État partie. Le transport sans une telle escale entre deux points du territoire d'un seul État partie n'est pas considéré comme international au sens de la présente convention.

(nous soulignons)

[21] L’article 1 de la Convention de Varsovie est au même effet.

[22] Air Algérie fait l’analyse du point de départ et du point de destination de chacun des passagers du vol AH5017[13]. La conclusion d’Air Algérie est que la Convention de Montréal s’applique à tous les passagers sauf pour trois passagers qui faisaient un aller-retour Alger-Ouagadougou. Selon Air Algérie, la Convention de Varsovie s’applique à ces trois passagers parce que l’Algérie n’est pas signataire de la Convention de Montréal[14].

[23] M. Zoungrana ne conteste pas ces conclusions.

b. Régime de responsabilité en vertu de la Convention de Montréal[15]

[24] La Convention de Montréal établit la responsabilité du transporteur en cas de décès d’un passager :

Article 17 — Mort ou lésion subie par le passager — Dommage causé aux bagages

1 Le transporteur est responsable du préjudice survenu en cas de mort ou de lésion corporelle subie par un passager, par cela seul que l'accident qui a causé la mort ou la lésion s'est produit à bord de l'aéronef ou au cours de toutes opérations d'embarquement ou de débarquement.



[25] L’article 21 de la Convention de Montréal prévoit le montant de l’indemnisation :

Article 21 — Indemnisation en cas de mort ou de lésion subie par le passager

1 Pour les dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 et ne dépassant pas 100 000 droits de tirage spéciaux par passager, le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité.

2 Le transporteur n'est pas responsable des dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 dans la mesure où ils dépassent 100 000 droits de tirage spéciaux par passager, s'il prouve :

a) que le dommage n'est pas dû à la négligence ou à un autre acte ou omission préjudiciable du transporteur, de ses préposés ou de ses mandataires, ou

b) que ces dommages résultent uniquement de la négligence ou d'un autre acte ou omission préjudiciable d'un tiers.

[26] Le transporteur est donc responsable pour les premiers 100 000 droits de tirage spéciaux de dommages par passager sans preuve de faute, et il est présumé responsable pour les dommages dépassant 100 000 droits de tirage spéciaux par passager mais peut repousser la présomption en prouvant que les dommages ne sont pas dus à sa négligence.

[27] Il s’agit d’un régime de responsabilité uniforme, qui s’applique sans égard à la juridiction où la réclamation est déposée.

[28] L’article 29 de la Convention de Montréal prévoit que le recours en vertu de la Convention est le recours exclusif :

Article 29 — Principe des recours

Dans le transport de passagers, de bagages et de marchandises, toute action en dommages-intérêts, à quelque titre que ce soit, en vertu de la présente convention, en raison d'un contrat ou d'un acte illicite ou pour toute autre cause, ne peut être exercée que dans les conditions et limites de responsabilité prévues par la présente convention, sans préjudice de la détermination des personnes qui ont le droit d'agir et de leurs droits respectifs. Dans toute action de ce genre, on ne pourra pas obtenir de dommages-intérêts punitifs ou exemplaires ni de dommages à un titre autre que la réparation.
(nous soulignons)
[29] L’article 2(5) de la Loi sur le transport aérien confirme que les régimes de responsabilité de la Convention de Varsovie et la Convention de Montréal « se substituent aux règles de droit pertinentes en vigueur au Canada » :

Responsabilité en cas de décès d’un passager

2(5) L'article 17 de l'annexe I [Convention de Varsovie] et l'article 17 de l'annexe VI [Convention de Montréal], qui fixent la responsabilité d'un transporteur en cas de décès d'un passager, se substituent aux règles de droit pertinentes en vigueur au Canada. Les dispositions énoncées à l'annexe II sont exécutoires en ce qui concerne tant les personnes par qui et pour le compte desquelles réparation peut être obtenue au titre de la responsabilité ainsi imposée que les modalités de mise en œuvre de celle-ci.

[30] La Convention de Montréal ne définit pas qui a droit à l’indemnisation en cas de décès ou qui a le droit de poursuivre. L’Annexe II de la Loi sur le transport aérien prévoit certaines dispositions relatives à la responsabilité du transporteur dans le cas de la mort d’un passager :

• L’article 1 définit les « membres de la famille » du passager qui peuvent avoir subi un préjudice par suite de sa mort;

• L’article 2 prévoit que l’action peut être intentée par le représentant personnel du passager, par un membre de la famille ou par le représentant personnel d’un membre de la famille; et

• L’article 3 prévoit notamment que le tribunal peut répartir le montant recouvré parmi les personnes qui y ont droit.

c. Compétence

[31] Les juridictions compétentes pour entendre l’action en responsabilité contre le transporteur aérien sont définies par l’article 33 de la Convention de Montréal :

Article 33 — Juridiction compétente

1 L'action en responsabilité devra être portée, au choix du demandeur, dans le territoire d'un des États Parties, soit devant le tribunal du domicile du transporteur, du siège principal de son exploitation ou du lieu où il possède un établissement par le soin duquel le contrat a été conclu, soit devant le tribunal du lieu de destination.

2 En ce qui concerne le dommage résultant de la mort ou d'une lésion corporelle subie par un passager, l'action en responsabilité peut être intentée devant l'un des tribunaux mentionnés au paragraphe 1 du présent article ou, eu égard aux spécificités du transport aérien, sur le territoire d'un État partie où le passager a sa résidence principale et permanente au moment de l'accident et vers lequel ou à partir duquel le transporteur exploite des services de transport aérien, soit avec ses propres aéronefs, soit avec les aéronefs d'un autre transporteur en vertu d'un accord commercial, et dans lequel ce transporteur mène ses activités de transport aérien à partir de locaux que lui-même ou un autre transporteur avec lequel il a conclu un accord commercial loue ou possède.

3 Aux fins du paragraphe 2 :

a) « accord commercial » signifie un accord autre qu'un accord d'agence conclu entre des transporteurs et portant sur la prestation de services communs de transport aérien de passagers;

b) « résidence principale et permanente » désigne le lieu unique de séjour fixe et permanent du passager au moment de l'accident. La nationalité du passager ne sera pas le facteur déterminant à cet égard.

4 La procédure sera régie selon le droit du tribunal saisi de l'affaire.

(nous soulignons)

[32] De plus, lorsque le transport est effectué pour le transporteur contractuel par un transporteur de fait, l’article 46 de la Convention de Montréal prévoit que l’action peut aussi être portée devant le tribunal du domicile du transporteur de fait ou du siège principal de son exploitation :

Article 46 — Juridiction annexe

Toute action en responsabilité, prévue à l'article 45, doit être portée, au choix du demandeur, sur le territoire d'un des États parties, soit devant l'un des tribunaux où une action peut être intentée contre le transporteur contractuel, conformément à l'article 33, soit devant le tribunal du domicile du transporteur de fait ou du siège principal de son exploitation.

(nous soulignons)

[33] Il y a donc sept juridictions compétentes en vertu de la Convention de Montréal[16] :

1. le domicile du transporteur contractuel;

2. le siège principal de l’exploitation du transporteur contractuel;

3. le domicile du transporteur de fait;

4. le siège principal de l’exploitation du transporteur de fait;

5. le lieu où le transporteur contractuel possède un établissement par le soin duquel le contrat a été conclu;

6. le lieu de destination du passager; et

7. la résidence principale et permanente du passager au moment de l'accident et vers laquelle ou à partir de laquelle le transporteur exploite des services de transport aérien.

[34] La Convention de Varsovie prévoit les six premières juridictions compétentes mais non la septième[17].

[35] Quatre juridictions compétentes sont en principe communes à tous les passagers : le domicile et le siège principal de l’exploitation du transporteur contractuel, et le domicile et le siège principal de l’exploitation du transporteur de fait. Les trois autres juridictions dépendent de facteurs particuliers à chaque passager.

[36] L’application de ces critères de compétence dans le présent dossier mène aux résultats suivants :

• Critères 1 et 2 : le transporteur contractuel est Air Algérie, et son domicile et le siège principal de son exploitation sont en Algérie. Toutefois, comme l’Algérie n’est pas signataire de la Convention de Montréal, les familles des 105 passagers dont le recours est régi par la Convention de Montréal ne peuvent poursuivre en Algérie. Les familles des trois passagers dont le recours est régi par la Convention de Varsovie peuvent poursuivre en Algérie.

• Critères 3 et 4 : le transporteur de fait est Swiftair S.A. qui a son domicile et le siège principal de son exploitation en Espagne. L’Espagne est signataire des deux conventions. Les familles de tous les passagers peuvent donc poursuivre en Espagne.

• Critère 5 : Air Algérie fait une analyse partielle du lieu de conclusion du contrat de chacun des passagers du vol AH5017 basée sur les informations qui lui sont disponibles, et conclut comme suit[18] :

• France : 45

• Burkina Faso : 38

• Canada : 12

• Algérie : 7

• Allemagne : 2

• Italie : 2

• Espagne : 1

• Suisse : 1

• Critère 6 : Air Algérie fait l’analyse du point de destination de chacun des passagers du vol AH5017 et conclut comme suit :[19]

• France : 53

• Burkina Faso : 41

• Canada : 9

• Algérie : 3

• Liban : 1

• Suisse : 1

• Critère 7 : Air Algérie plaide qu’elle n’a pas suffisamment d’informations pour déterminer la résidence principale et permanente des passagers au moment de l'accident. La liste établie par la police spéciale de l’aéroport international d’Ouagadougou résumée au paragraphe 5 n’indique pas s’il s’agit de la citoyenneté ou de la résidence et le Tribunal ne peut donc se fier à ces données.

[37] En fonction de cette analyse, Air Algérie conclut que :

• Les familles de tous les passagers peuvent poursuivre en Espagne;

• Les familles d’au moins[20] 54 passagers peuvent poursuivre en France;

• Les familles d’au moins 42 passagers peuvent poursuivre au Burkina Faso;

• Les familles d’au moins 12 passagers peuvent poursuivre au Canada;

• D’autres familles peuvent poursuivre en Algérie, Allemagne, Italie, Espagne, Liban ou Suisse.

[38] M. Zoungrana ne conteste pas cette analyse ni les conclusions. Les parties ont signé et déposé au dossier de la cour les admissions suivantes[21] :

1. Les parties s’entendent que seuls douze (12) des passagers du vol AH5017, et par conséquent, leurs ayants droit (tel que précisé à l’Annexe II de la Loi sur le transport aérien), peuvent incontestablement être soumis à la juridiction canadienne dans le cadre d’un recours pour dommages contre le transporteur en vertu des cinq (5) juridictions prévues à l’Article 33 de la Convention de Montréal (Annexe VI de la Loi sur le transport aérien) (le premier groupe);

2. Le Requérant admet que les 98 autres passagers du vol AH5017, et donc leurs ayants droit (tel que précisé à l’Annexe II de la Loi sur le transport aérien), font partie de groupes qui ne pourraient pas, sans s’appuyer sur le premier groupe, être soumis à la compétence des tribunaux canadiens au sens des cinq (5) juridictions prévues à la Convention de Montréal (les autres groupes subséquents);

3. L’intimée conteste toutefois que les autres groupes subséquents peuvent s’appuyer sur le premier groupe pour obtenir la compétence des tribunaux canadiens.

[39] Pour les fins du présent jugement, le Tribunal fera référence aux 12 passagers dont les familles peuvent poursuivre au Canada en vertu de la Convention de Montréal comme les passagers « canadiens ». Les autres passagers sont les passagers « non-canadiens ».

[40] Il y a des liens de parenté entre certains des 12 passagers « canadiens ». Par exemple, l’épouse de M. Zoungrana et leurs deux fils sont tous membres de la même famille. Les 12 passagers « canadiens » sont membres de quatre familles. Pour les fins du présent jugement, le Tribunal fera référence aux quatre familles qui peuvent poursuivre au Canada en vertu de la Convention de Montréal comme les familles « canadiennes ». Les autres familles sont les familles « non-canadiennes ».

POSITION DES PARTIES

[41] Il n’est pas contesté que le Tribunal a compétence pour entendre la réclamation de M. Zoungrana et des autres membres de sa famille quant aux trois passagers membres de sa famille. Le Tribunal a aussi compétence pour entendre les réclamations des trois autres familles « canadiennes » en ce qui concerne les neuf autres passagers « canadiens ».

[42] Quant aux 96 passagers « non-canadiens », M. Zoungrana soutient que l’action collective québécoise permet l’inclusion dans le groupe de membres qui ne respectent pas sur une base individuelle les règles de compétence des tribunaux québécois. Selon lui, les familles de passagers qui ne peuvent pas poursuivre sur une base individuelle au Québec en fonction de la Convention de Montréal peuvent néanmoins faire partie d’une action collective au Québec.

[43] De plus, et de façon subsidiaire, il plaide que l’article 3136 C.c.Q. permet aux tribunaux québécois de prendre compétence en cas de nécessité sur les réclamations de personnes qui ne respectent pas les règles de compétence de la Convention de Montréal.

[44] Enfin, M. Zoungrana plaide qu’avec un groupe qui inclut les familles des 108 passagers, les critères pour l’autorisation de l’action collective prévus à l’article 575 du Code de procédure civile sont respectés.

[45] Air Algérie plaide que les règles de compétence prévues à la Convention de Montréal sont exclusives et ne sont aucunement modifiées par la procédure d’action collective prévue au Code de procédure civile.

[46] Elle ajoute que même en vertu du droit québécois, la procédure d’action collective ne modifie pas les règles de compétence des tribunaux québécois.

[47] Quant à l’argument subsidiaire, Air Algérie plaide que l’article 3136 C.c.Q. est exclu par la Convention de Montréal. Elle ajoute que les conditions de l’article 3136 C.c.Q. ne sont pas respectées.

[48] En conséquence, elle dépose une demande en exception déclinatoire pour faire rejeter la demande en autorisation à l’égard des familles des 96 passagers « non-canadiens ».

[49] De plus, quant aux 12 passagers « canadiens », Air Algérie déclare qu’elle ne soulèvera pas les moyens de défense prévus à l’article 21(2) de la Convention de Montréal. En conséquence, la seule question à être tranchée pour les familles des 12 passagers « canadiens » est la valeur des dommages individuels. Air Algérie soumet que ce n’est pas une question commune, et donc que la demande en autorisation pour les familles des 12 passagers « canadiens » ne répond pas aux critères de l’article 575 C.p.c., et doit être rejetée.

QUESTIONS EN LITIGE

[50] Le Tribunal doit donc trancher les questions suivantes :

1. Est-ce que la demande en exception déclinatoire est le moyen approprié pour soulever la compétence du Tribunal quant aux membres du groupe autre que le demandeur?

2. Est-ce que le Tribunal peut inclure les familles « non-canadiennes » dans le groupe?

a. Par la nature de l’action collective et dans le contexte de recours en vertu de la Convention de Montréal, ou

b. En application de l’article 3136 C.c.Q.

3. Est-ce que les critères pour l’autorisation d’une action collective prévus à l’article 575 C.p.c. sont satisfaits?

ANALYSE

1. La demande en exception déclinatoire

[51] Air Algérie soulève la question de la compétence du Tribunal d’inclure dans le groupe les familles de passagers « non-canadiens » qui n’auraient pas le droit de poursuivre sur une base individuelle au Canada.

[52] Air Algérie soulève cette question par demande en exception déclinatoire. La conclusion de la demande en exception déclinatoire se lit ainsi :

REJETER la Requête en autorisation d’exercer un recours collectif et pour obtenir le statut de représentant présentée par le Requérant à l’égard des ayants-droit des 96 passagers du vol AH5017 qui ne répondent pas aux critères des articles 33 de la Convention de Montréal ou 28 de la Convention de Varsovie, telle qu’amendée par le Protocole de La Haye, en regard de la compétence de la Cour Supérieure de Montréal;

[53] Sans traiter à ce stade du bien-fondé de l’argument, le Tribunal estime que le moyen procédural de la demande en exception déclinatoire est mal choisi.

[54] La seule procédure qui existe à ce stade est la demande d’autorisation. Tous s’entendent que M. Zoungrana peut poursuivre Air Algérie au Québec. La demande en exception déclinatoire ne vise pas M. Zoungrana. De toute façon, elle serait mal fondée à son égard.

[55] La demande en exception déclinatoire est prématurée en ce qui concerne l’action collective et les personnes autres que M. Zoungrana, puisque l’action collective n’existe pas encore et les personnes autres que M. Zoungrana ne sont pas encore membres du groupe.

[56] L’article 584 C.p.c. reconnaît la possibilité de présenter un moyen préliminaire à l’encontre d’une action collective :

584. Le défendeur ne peut opposer au représentant un moyen préliminaire que s'il est commun à une partie importante des membres et porte sur une question traitée collectivement. Il ne peut non plus demander une scission de l'instance ou introduire une demande reconventionnelle.

[57] Toutefois, cet article se retrouve dans le chapitre sur le déroulement de l’action collective et se situe donc après l’autorisation. De plus, la référence dans cet article à des membres et aux questions traitées collectivement confirme que cet article s’applique seulement après l’autorisation comme il n’existe pas de membres ou de questions traitées collectivement avant l’autorisation.

[58] Dans certaines actions collectives, le défendeur présente une demande en exception déclinatoire avant l’autorisation. Toutefois, dans ces dossiers, l’exception déclinatoire vise soit la réclamation individuelle du demandeur ou l’ensemble des réclamations individuelles, y inclus celle du demandeur[22].

[59] Dans le cas présent, la demande en exception déclinatoire est présentée avant l’autorisation de l’action collective et elle ne vise pas la réclamation du demandeur mais seulement les réclamations de certains membres potentiels du groupe. Pour cette raison, la demande en exception déclinatoire doit être rejetée.

[60] Toutefois, le Tribunal examinera les arguments mis de l’avant par Air Algérie sur la compétence du Tribunal quant aux familles « non-canadiennes » dans son analyse de la définition du groupe dans le cadre de la demande en autorisation.

2. Compétence du Tribunal d’inclure les familles « non-canadiennes » dans le groupe

[61] Vu l’importance de la définition du groupe sur l’évaluation des critères prévus à l’article 575 C.p.c., le Tribunal traitera de cette question comme question préliminaire à son analyse des critères de l’article 575 C.p.c.

a. Compétence et actions collectives

[62] Sujet à son argument subsidiaire portant sur l’article 3136 C.c.Q., M. Zoungrana reconnaît que les familles des passagers « non-canadiens » ne rencontrent aucun des sept critères de compétence prévus à l’article 33 de la Convention de Montréal. Toutefois, il plaide que la nature de l’action collective et l'interprétation correcte de l'article 33 de la Convention de Montréal permettent la possibilité d’actions collectives comprenant les membres de plusieurs juridictions

[63] Plus concrètement, il plaide ce qui suit :

1. Il a le droit de poursuivre au Québec en vertu de la Convention de Montréal;

2. Suivant l’article 33(4) de la Convention de Montréal, « La procédure sera régie selon le droit du tribunal saisi de l'affaire »;

3. Le droit procédural au Québec inclut l’action collective; et

4. L’action collective au Québec peut inclure des membres dont le recours individuel ne respecte pas les règles de compétence des tribunaux québécois.

[64] Les trois premiers points sont incontestables. Pas le quatrième.

[65] Le Tribunal traitera d’abord des règles de compétence applicables aux actions collectives au Québec de façon générale, et traitera dans un deuxième temps du contexte particulier de la Convention de Montréal.

Règles de compétence applicables aux actions collectives au Québec

[66] M. Zoungrana plaide qu’il est suffisant pour autoriser l’action collective que son recours individuel respecte les règles de compétence des tribunaux québécois. Il plaide que les membres du groupe ne sont pas des parties et qu’en conséquence leurs recours individuels n’ont pas à respecter les règles de compétence ordinaires.

[67] D’abord, la Cour d’appel a tranché la question du statut des membres et a conclu comme suit[23] :

[48] Selon moi, l’état du droit concernant le statut des membres d’un groupe visé par un recours collectif est tel que décrit par mes collègues Vézina dans l’arrêt Brochu et Wagner dans l’arrêt Imperial Tobacco. Pas plus, pas moins. Ils sont demandeurs dans l’action collective et leur statut est « bien près » de celui d’une partie à l’instance.

[68] De plus, les tribunaux ont répété à de nombreuses reprises que l’action collective « demeure un véhicule procédural dont l’emploi ne modifie ni ne crée des droits substantiels »[24]. La Cour suprême ajoute dans Bisaillon[25] :

22 En bref, la procédure de recours collectif ne saurait avoir pour effet de conférer à la Cour supérieure compétence sur un ensemble de litiges qui, autrement, relèveraient de la compétence ratione materiae d’un autre tribunal. Sauf dans la mesure prévue par la loi, cette procédure ne modifie pas la compétence des tribunaux. Elle ne crée pas non plus de nouveaux droits substantiels.

[69] Il s’agissait dans Bisaillon de compétence ratione materiae, mais le même principe doit s’appliquer à la compétence ratione personae.

[70] En conséquence, une personne ne peut être membre du groupe visé par une action collective au Québec que si les tribunaux québécois ont compétence pour entendre sa réclamation individuelle[26]. La procédure de l’action collective ne lui donne pas le droit de poursuivre au Québec si elle n’avait pas déjà ce droit.

[71] Conformément à ce principe, la jurisprudence est à l’effet suivant :

• Si le défendeur a son domicile ou sa résidence au Québec, ou un établissement au Québec et la contestation est relative à son activité au Québec, les tribunaux québécois ont compétence sans égard au domicile du demandeur[27] et ils peuvent donc autoriser une action collective avec un groupe qui inclut des membres non-résidents du Québec[28]; et

• Si le défendeur n’a pas son domicile, sa résidence ou un établissement au Québec, les tribunaux québécois ne sont pas compétents à l’égard des non-résidents et ne peuvent pas les inclure dans le groupe à moins que les faits générateurs (faute, préjudice, fait dommageable, ou une des obligations du contrat[29]) se sont produits au Québec[30].

[72] Ces principes ne sont aucunement remis en question par le jugement de la Cour suprême du Canada dans l’affaire Banque de Montréal c. Marcotte[31], où la Cour suprême conclut que le demandeur peut demander l’autorisation d’une action collective contre plusieurs défendeurs, même s’il n’a pas une cause d’action directe contre chaque défendeur. Dans le cas de l’intérêt, le manque d’intérêt personnel du demandeur est comblé par l’intérêt des membres. Le présent cas soulève le problème inverse : M. Zoungrana a le droit de poursuivre au Québec et ce sont certains des membres qui n’ont pas ce droit. Rien dans le raisonnement de la Cour suprême dans Marcotte ne peut leur donner ce droit.

Contexte particulier de la Convention de Montréal

[73] Même si l’action collective au Québec permettait aux tribunaux d’inclure dans le groupe des membres dont le recours individuel serait hors la compétence des tribunaux québécois (ce qui n’est pas l’état du droit au Québec), une telle règle ne saurait s’appliquer à des recours intentés sous la Convention de Montréal.

[74] Dans Thibodeau c. Air Canada, la Cour suprême décrit les objectifs de la Convention de Montréal comme suit[32] :

[41] La Convention de Varsovie (et par le fait même la Convention de Montréal qui lui a succédé) avait trois principaux objectifs : instaurer des règles uniformes applicables aux réclamations découlant du transport aérien international; protéger le secteur du transport aérien international en limitant la responsabilité du transporteur; et assurer l’équilibre entre cet objectif de protection et l’intérêt des passagers et des autres qui cherchent à obtenir réparation. Ces objectifs répondaient aux craintes que plusieurs régimes juridiques s’appliquent au transport aérien international, ce qui pourrait se traduire par une absence d’uniformité ou de prévisibilité quant à la responsabilité du transporteur ou aux droits des passagers et des autres utilisateurs du service. Tant les passagers que les transporteurs risquaient de subir les conséquences de ce manque d’uniformité. On croyait également que l’industrie naissante du transport aérien international avait besoin d’être protégée des litiges potentiellement ruineux entre plusieurs États et d’une responsabilité pratiquement illimitée.

[75] La Convention de Montréal représente donc un équilibre entre la protection de transporteurs et l’intérêt des passagers. La Cour suprême du Royaume-Uni le dit plus succinctement[33] :

He explained that the Convention was a package. It gave to passengers significant rights, easily enforceable, but it imposed limitations.

[76] L’article 29 de la Convention de Montréal prévoit que le recours est exclusif :

Article 29 — Principe des recours

Dans le transport de passagers, de bagages et de marchandises, toute action en dommages-intérêts, à quelque titre que ce soit, en vertu de la présente convention, en raison d'un contrat ou d'un acte illicite ou pour toute autre cause, ne peut être exercée que dans les conditions et limites de responsabilité prévues par la présente convention, sans préjudice de la détermination des personnes qui ont le droit d'agir et de leurs droits respectifs. Dans toute action de ce genre, on ne pourra pas obtenir de dommages-intérêts punitifs ou exemplaires ni de dommages à un titre autre que la réparation.

(nous soulignons)

[77] Les tribunaux à travers le monde ont interprété l’exclusivité de la Convention de Montréal de façon stricte[34]. Dans Thibodeau c. Air Canada, la Cour suprême dit ce qui suit[35] :

[57] Pour résumer, le texte et l’objet de la Convention de Montréal, de même qu’un fort courant jurisprudentiel international, montrent que les actions en dommages-intérêts liées à des matières qui relèvent de cette convention ne peuvent être exercées que si elles sont expressément autorisées par les dispositions de celle-ci. Comme l’a dit tout récemment la Cour suprême du Royaume-Uni, [traduction] « [l]a Convention est censée traiter exhaustivement de la responsabilité du transporteur à l’égard de tout ce qui peut arriver physiquement au passager entre le moment de l’embarquement et celui du débarquement » : Stott, par. 61.

(nous soulignons)

[78] La Cour suprême du Royaume-Uni ajoute[36] :

To permit exceptions, whereby the passenger could sue outside the Convention for losses sustained in the course of international carriage by air, would distort the whole system, even in cases for which the Convention did not create any liability on the part of the carrier.

[79] La question des juridictions compétentes fait partie de cet équilibre[37] :

L’art. 33 CM contribue également à cet équilibre, d’une part en ce qu’il facilite au lésé la mise en cause du transporteur par l’ouverture de cinq fors, mais d’autre part limite le nombre de ceux-ci, rendant prévisible pour le transporteur le risque encouru. Aussi, la suppression ou l’ajout de chefs de compétence, au titre de la lex fori, viendrait rompre cet équilibre et ne serait pas conforme à la finalité de l’art. 33 CM.

(référence omise)

[80] En conséquence, la même règle d’exclusivité s’applique à la question de compétence.

[81] M. Zoungrana plaide que l’article 33(4) de la Convention de Montréal, qui prévoit que « La procédure sera régie selon le droit du tribunal saisi de l'affaire », incorpore les règles de procédure prévues au Code de procédure civile dans le cas de recours intentés au Québec en vertu de la Convention de Montréal.

[82] Il a raison. Le Code de procédure civile s’applique au présent dossier. Toutefois, ce ne sont que les règles de procédure qui s’appliquent. La Convention de Montréal prévoit des règles de compétence très précises. Elle identifie sept juridictions compétentes. Lorsqu’elle ajoute que la procédure sera régie selon le droit du tribunal saisi de l'affaire, ce n’est pas une invitation au législateur du tribunal saisi de l’affaire de modifier les règles de compétence avec son code de procédure civile. L’auteur Laurent Chassot conclut comme suit[38] :

La première de ces dispositions [art. 33 CM], qui énonce cinq fors de compétence, doit être comprise, eu égard à l’objectif d’unification et l’impératif de sécurité du droit, comme impliquant le droit du lésé de choisir librement le for de son action et le droit du transporteur de n’être attrait que devant les seuls tribunaux mentionnés. Toute règle nationale ou européenne portant atteinte à ces prérogatives doit être écartée. À cet égard, il a été souligné que le renvoi à la lex fori, opéré par l’art. 33 § 4 CM, est de nature déclarative et ne saurait restreindre la portée de la règle uniforme de compétence.

(références omises; nous soulignons)

[83] Donc, les règles sur les demandes conjointes et sur les actions collectives prévues au Code de procédure civile s’appliquent, mais seulement dans la mesure où les tribunaux québécois ont compétence pour entendre les réclamations individuelles en vertu de la Convention de Montréal. Le Code de procédure civile ne peut pas modifier les règles de compétence prévues dans la Convention de Montréal.

b. Application de l’article 3136 C.c.Q.

[84] Comme argument subsidiaire, M. Zoungrana plaide l’application de l’article 3136 C.c.Q. pour donner compétence aux tribunaux québécois :

3136. Bien qu'une autorité québécoise ne soit pas compétente pour connaître d'un litige, elle peut, néanmoins, si une action à l'étranger se révèle impossible ou si on ne peut exiger qu'elle y soit introduite, entendre le litige si celui-ci présente un lien suffisant avec le Québec.

[85] Air Algérie plaide que cet article ne s’applique pas aux recours intentés en vertu de la Convention de Montréal, et ajoute que les conditions d’application de cet article ne sont pas rencontrées.

Application de l’article 3136 C.c.Q. à un recours intenté en vertu de la Convention de Montréal

[86] L’argument est le même que dans la section précédente : la Convention de Montréal prévoit l’ensemble des règles de compétence et on ne saurait modifier ces règles en y ajoutant une règle comme l’article 3136 C.c.Q. L’article 33(4) de la Convention de Montréal laisse place pour les règles de procédure du for, mais pas pour les règles de compétence.

[87] Cet argument est bien fondé et exclut l’application de l’article 3136 C.c.Q.

Conditions d’application de l’article 3136 C.c.Q.

[88] Toutefois, même si le Tribunal a tort et l’article 3136 C.c.Q. peut s’appliquer à un recours en vertu de la Convention de Montréal, le Tribunal considère que les conditions d’application ne sont pas rencontrées.

[89] L’article 3136 prévoit deux conditions d’application :

1. l’action à l'étranger se révèle impossible ou on ne peut exiger qu'elle y soit introduite, et

2. le litige présente un lien suffisant avec le Québec.

[90] Le fardeau de prouver les deux conditions est sur celui qui invoque cet article[39].

[91] Air Algérie plaide deux conditions additionnelles :

• La demande doit être présentée par la personne pour le bénéfice de qui l’article 3136 C.c.Q. est invoqué; et

• Cette personne doit se trouver sur le territoire québécois.

[92] Le Tribunal rejette ces deux conditions additionnelles. Elles ne se retrouvent pas à l’article 3136 C.c.Q. La Cour d’appel mentionne le « plaideur qui se trouve sur le territoire québécois » dans l’arrêt Lamborghini[40]. Toutefois, dans un arrêt subséquent, la Cour d’appel discute de la possibilité d’appliquer l’article 3136 C.c.Q. dans le cadre d’une action collective[41]. Même si la Cour d’appel conclut que l’article 3136 C.c.Q. ne s’appliquait pas dans les faits de ce dossier, elle était prête à permettre au représentant d’invoquer l’article pour le bénéfice des membres et alors que les membres ne se trouvaient pas sur le territoire québécois.

Impossibilité (ou presque) de poursuivre à l’étranger

[93] M. Zoungrana met de l’avant 12 juridictions étrangères qui pourraient être compétentes pour les familles d’un ou de plusieurs passagers « non-canadiens » : l’Algérie, le Liban, les Émirats-Arabes Unis, la France, la Suisse, l’Allemagne, la Belgique, le Burkina Faso, l’Égypte, le Mali, la Grande-Bretagne et l’Espagne.

[94] Il plaide qu’aucune de ces juridictions n’est appropriée dans le cas présent. Il plaide deux motifs :

• Quant à l’Algérie, le Liban, les Émirats-Arabes Unis, le Burkina Faso, l’Égypte et le Mali, il plaide que ces pays ne sont pas intègres, que la justice n’est pas indépendante, et que ce ne sont pas des « états de droit ».

• Quant à l’ensemble des 12 juridictions étrangères (incluant la France, la Suisse, l’Allemagne, la Belgique, la Grande-Bretagne et l’Espagne), il plaide qu’il n’existe pas de mécanisme d’action collective similaire au Québec[42]. En particulier, il plaide qu’en Espagne[43] « No class actions are available ».

[95] Pour prouver la qualité du système de justice dans les six juridictions, M. Zoungrana produit ce qui suit :

• Le classement des pays les plus corrompus, publié par Transparency International, qui montre que les six pays sont classés 35e (les Émirats-Arabes Unis), 80e (le Burkina Faso), 92e (l’Algérie), 96e (le Mali), 102e (le Liban) et 115e (l’Égypte) sur 180 pays[44]; et

• L’analyse « Corruption by Country/Territory » publiée par Transparency International au sujet de chacun des six pays avec des articles publiés au sujet de la corruption ou du système judiciaire dans chaque pays[45].

[96] M. Zoungrana ne produit aucune preuve sur l’existence ou non de l’action collective en Algérie, Liban, Burkina Faso ou Mali, indiquant que ce sont les états les plus corrompus, avec une justice peu indépendante et un faible état de droit. Quant aux huit autres juridictions, il produit :

• Un article publié par Thomson Reuters pour chaque juridiction écrit par un avocat local et répondant à une série de questions dont « Are there any mechanisms available for collective redress or class actions? »[46];

• Une copie de la règle de pratique 21 en Angleterre portant sur les actions collectives[47];

• Des articles Wikipedia intitulés « Class action » et « Recours collectif »[48]; et

• La réponse de la Chambre de commerce et d’industrie de Paris en 2011 à la consultation lancée par la Commission européenne sur une approche européenne en matière de recours collectifs[49].

[97] M. Zoungrana dépose aussi comme source des articles de doctrine portant sur les actions collectives en France[50] et en Europe[51].

[98] Air Algérie a répondu à cette preuve avec la preuve suivante :

• Étude sur l’accès à la justice au Burkina Faso, publiée en septembre 2012[52];

• Étude sur « Accès à la justice et aide judiciaire dans les pays partenaires méditerranéens » portant sur l’Algérie, l’Israël, la Jordanie, le Maroc, la Palestine et la Tunisie[53];

• Déclaration assermentée de Nour-Eddine Terki, professeur et doyen honoraire de la Faculté de droit de l’Université d’Alger sur le système judiciaire en Algérie[54]; et

• Déclaration assermentée de Frank Didier Toe, avocat au Burkina Faso, sur le système judiciaire au Burkina Faso[55].

[99] Air Algérie plaide que l’existence de l’action collective dans les autres juridictions n’est pas pertinente, mais ajoute quant à l’Espagne que la réponse complète dans le document produit par M. Zoungrana est[56] :

No class actions are available. Collective claims can be made through the representation of consumers’ associations or simply by groups of consumers. In any event, the claimants can request the court to make a public announcement of the existence of the claim.

If the scope of claimants can be easily determined, the claimants must give notice to other potential claimants so they can join the collective claim at any time, but the proceedings do not stop. If the scope of potential claimants is not easy to determine, the public announcement suspends the proceedings for two months, after which no new claimants can be added to the collective claim, without prejudice to the right to bring separate legal actions on their own.

[100] Le Tribunal ne commente pas l’admissibilité ou la force probante de cette preuve. Au stade de l’autorisation, le principe de la proportionnalité exige que le Tribunal n’impose pas un fardeau indu aux parties.

[101] Toutefois, même en acceptant toute la preuve déposée par M. Zoungrana, il ne rencontre pas son fardeau pour le premier critère de l’article 3136 C.c.Q.

[102] Le Juge LeBel, alors à la Cour d’appel, décrit ce critère de la façon suivante dans l’arrêt Lamborghini, qui est l’arrêt de principe sur l’article 3136 C.c.Q.[57] :

Selon ses sources législatives, cette disposition représente plutôt une exception étroite aux règles normales de compétence. Elle ne vise pas à permettre au tribunal québécois de s'approprier une compétence qu'il ne posséderait pas autrement. Elle veut régler certains problèmes d'accès à la justice, pour un plaideur qui se trouve dans le territoire québécois, lorsque le forum étranger normalement compétent lui est inaccessible pour des raisons exceptionnelles, comme une impossibilité en droit ou une impossibilité pratique, presque absolue. Ainsi, on peut penser à celles résultant de la rupture des relations diplomatiques ou commerciales avec un État étranger ou de la nécessité de la protection d'un réfugié politique, ou à l'existence d'un danger physique sérieux, si l'on entame un débat devant le tribunal étranger.

(nous soulignons)

[103] L’article 3136 C.c.Q. n’est pas le pendant de l’article 3135 C.c.Q. Sous l’article 3135 C.c.Q., le tribunal doit choisir entre deux juridictions compétentes et peut décliner compétence si l’autre juridiction est plus appropriée. Sous l’article 3136 C.c.Q., les tribunaux québécois ne sont pas compétents en fonction de nos règles de compétence, mais ils peuvent exceptionnellement entendre le litige « si une action à l'étranger se révèle impossible ou si on ne peut exiger qu'elle y soit introduite ». La barre est très haute. Il ne suffit pas de démontrer qu’il serait préférable de poursuivre au Québec. Il ne suffit pas de plaider que la qualité du système judiciaire ou de la justice est moindre dans l’autre pays. Il faut démontrer l’impossibilité ou une situation qui s’y approche. Il s’agit d’un « for de nécessité » et non d’un « for de convenance »[58].

[104] Dans le présent cas, la Convention de Montréal permet à toutes les familles de poursuivre en Espagne et donne à un nombre important de familles l’option de poursuivre en France ou au Burkina Faso. Les familles de 12 passagers ont l’option de poursuivre au Canada, et les familles d'autres passagers ont l’option de poursuivre ailleurs au monde.

[105] Peut-on dans ces circonstances dire qu’il est impossible ou presque pour les familles de poursuivre à l’étranger?

[106] Prenons d’abord l’Espagne. Les familles de tous les passagers peuvent poursuivre en Espagne. M. Zoungrana ne conteste pas la qualité du système judiciaire ou de la justice espagnole. Le seul argument est qu’il n’y a pas d’actions collectives en Espagne.

[107] D’abord, il n’est pas clair si l’action collective pour le bénéfice de consommateurs en Espagne est disponible pour les victimes d’un accident d’avion. Pour les fins du présent jugement, le Tribunal présume qu’il ne l’est pas.

[108] Est-ce que le fait de devoir procéder par actions individuelles ou actions conjointes signifie qu’il est impossible ou presque de poursuivre en Espagne?

[109] L’absence d’une procédure d’action collective peut rendre le recours en Espagne difficile ou peu pratique, pour reprendre le langage de l’art. 575, al. 3 C.p.c., mais il n’est pas impossible ou presque de poursuivre en Espagne. Ceci est surtout vrai dans le présent dossier où il n’y a que 96 passagers « non-canadiens » et ils sont tous identifiés et leurs familles sont toutes représentées par avocat.

[110] Même un recours au Burkina Faso par les familles burkinaises ne serait pas impossible ou presque. Elles sont représentées par un avocat burkinais. La déclaration de Me Toe[59] indique que les tribunaux du Burkina Faso sont accessibles aux familles et sont à même de traiter leurs demandes d’indemnisation. Même certaines des familles ont saisi en janvier 2015 le Président du Tribunal de Grande Instance d’Ouagadougou de leur réclamation pour l’avance qu’Air Algérie devait leur payer et M. Zoungrana croit qu’elles ont été payées.

[111] Le Tribunal conclut que M. Zoungrana n’a pas réussi à démontrer qu’ « une action à l'étranger se révèle impossible ou [qu’] on ne peut exiger qu'elle y soit introduite ».

Lien suffisant avec le Québec

[112] De toute façon, même si M. Zoungrana avait passé le premier test, il devait aussi démontrer le lien suffisant entre le litige et le Québec.

[113] Il est admis que 12 passagers ont un lien avec le Canada selon la Convention de Montréal. Il est aussi admis que les 96 autres passagers n’ont pas un lien suffisant avec le Canada, selon les critères de la Convention de Montréal. Il demeure possible que ces passagers aient un lien suffisant avec le Canada qui n’est pas reconnu à la Convention de Montréal, mais aucun tel lien n’est allégué ou prouvé.

[114] En conséquence, le seul lien entre les 96 autres passagers et le Canada est que 12 passagers sur le même vol avaient un lien avec le Canada. Le seul lien entre les recours des familles des 96 passagers « non-canadiens » et le Canada est que les familles de 12 autres passagers « canadiens » ont un recours identique qu’elles peuvent poursuivre au Canada. Ce n’est pas un lien suffisant au sens de l’article 3136 C.c.Q.

[115] L’article 33 de la Convention de Montréal définit la compétence des tribunaux passager par passager. Reconnaître que les familles de tous les passagers peuvent poursuivre au Canada dès que l’un d’entre eux peut le faire irait à l’encontre de la Convention de Montréal.

[116] Le Tribunal rejette l’argument fondé sur l’article 3136 C.c.Q.

[117] En conséquence, le Tribunal conclut que dans son analyse des critères pour l’autorisation d’une action collective, il doit limiter le groupe potentiel aux familles des 12 passagers « canadiens ».

3. Critères pour l’autorisation d’une action collective

[118] L’article 575 C.p.c. énumère les critères pour l’autorisation d’une action collective :

575. Le tribunal autorise l'exercice de l'action collective et attribue le statut de représentant au membre qu'il désigne s'il est d'avis que:

1° les demandes des membres soulèvent des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes;

2° les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées;

3° la composition du groupe rend difficile ou peu pratique l'application des règles sur le mandat d'ester en justice pour le compte d'autrui ou sur la jonction d'instance;

4° le membre auquel il entend attribuer le statut de représentant est en mesure d'assurer une représentation adéquate des membres.

a. Les demandes des membres soulèvent des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes

[119] Les demandes des membres sont toutes fondées sur le régime de responsabilité prévu à la Convention de Montréal, dont l’article 21 prévoit :

Article 21 — Indemnisation en cas de mort ou de lésion subie par le passager

1 Pour les dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 et ne dépassant pas 100 000 droits de tirage spéciaux par passager, le transporteur ne peut exclure ou limiter sa responsabilité.

2 Le transporteur n'est pas responsable des dommages visés au paragraphe 1 de l'article 17 dans la mesure où ils dépassent 100 000 droits de tirage spéciaux par passager, s'il prouve :

a) que le dommage n'est pas dû à la négligence ou à un autre acte ou omission préjudiciable du transporteur, de ses préposés ou de ses mandataires, ou

b) que ces dommages résultent uniquement de la négligence ou d'un autre acte ou omission préjudiciable d'un tiers.

[120] À l’audition, Air Algérie a renoncé à la possibilité de repousser la présomption en ce qui concerne les familles des 12 passagers « canadiens ».

[121] En conséquence, Air Algérie est responsable de tous les dommages. Le litige entre Air Algérie et les familles des 12 passagers « canadiens » ne portera que sur la quantification de leurs dommages.

[122] Air Algérie plaide que la quantification des dommages ne soulève pas des questions de droit ou de fait identiques, similaires ou connexes.

[123] Le Tribunal n’est pas d’accord.

[124] Il y a une série de questions qui pourraient être soulevées dans ce dossier qui seraient communes :

• Quels membres des familles ont le droit à une indemnisation;

• Qui peut intenter l’action en recouvrement au nom des familles;

• Quels sont les types de dommages;

• Comment quantifier les dommages.

[125] Le Tribunal conclut que le premier critère est satisfait.

b. Les faits allégués paraissent justifier les conclusions recherchées

[126] Avec la renonciation d’Air Algérie, la responsabilité est établie.

[127] En conséquence, le deuxième critère est satisfait.

c. La composition du groupe rend difficile ou peu pratique l'application des règles sur le mandat d'ester en justice pour le compte d'autrui ou sur la jonction d'instance

[128] Le groupe se limite aux familles des 12 passagers « canadiens ». Ces 12 passagers viennent de quatre familles. En conséquence, le groupe se limite à quatre familles. Les quatre familles sont déjà représentées par le même avocat.

[129] De plus, la Loi sur le transport aérien ne requiert pas que tous les membres des familles participent au recours. Une personne peut poursuivre pour tous les membres de la famille et le Tribunal dans son jugement peut répartir le montant recouvré entre les personnes qui y ont droit[60].

[130] En conséquence, le recours des familles des 12 passagers ne requiert que quatre demandeurs.

[131] Le Tribunal ne peut conclure qu’il serait difficile ou peu pratique de réunir les quatre demandeurs dans une seule action.

[132] Le troisième critère n’est donc pas satisfait.

d. Le membre auquel il entend attribuer le statut de représentant est en mesure d'assurer une représentation adéquate des membres

[133] Air Algérie admet que M. Zoungrana est en mesure d'assurer une représentation adéquate des membres. Même sans cette admission il est clair que M. Zoungrana satisfait le quatrième critère.

CONCLUSION

[134] La demande en autorisation d’exercer une action collective sera donc rejetée. Dans les circonstances de ce dossier, et étant donné que M. Zoungrana a déposé la requête pour le bénéfice des familles des passagers « non-canadiens », chaque partie devra payer ses frais de justice.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[135] REJETTE la requête en autorisation d’exercer un recours collectif et pour obtenir le statut de représentant;

[136] SANS FRAIS DE JUSTICE.



__________________________________
Stephen W. Hamilton, j.c.s.

Me Gérard Samet
COLAS MOREIRA KARANDJIAN ZIKOVSKY
Pour le demandeur

Me Catherine Chaput
GASCO GOODHUE ST-GERMAIN, s.e.n.c.r.l.
Pour la défenderesse

Date d’audience :
31 mars 2016


[1] Certains documents réfèrent à 110 passagers, mais ce chiffre inclut deux employés d’Air Algérie qui tombent sous un autre régime de compensation.
[2] Pièce R-6.
[3] Pièce R-5. Toutefois, ces données n’indiquent pas s’il s’agit de la citoyenneté ou de la résidence et le Tribunal ne peut donc se fier à ces données. Elles sont fournies à titre indicatif seulement.
[4] Pièce R-12.
[5] Pièce I-4.
[6] Pièce R-10.
[7] Pièce R-12.
[8] Pièces R-9, R-10 et R-18D.
[9] Pièces R-9, R-13 à R-17 et R-18C.
[10] Pièce R-12.
[11] Pièce R-18A.
[12] L.R.C. (1985), ch. C-26.
[13] Pièce I-1.
[14] Liste de pays signataires de la Convention de Montréal.
[15] Le régime de responsabilité en vertu de la Convention de Varsovie est semblable, sauf que l’indemnisation sans faute est moins élevée, et le fardeau de prouver la faute tombe sur la famille du passager.
[16] Laurent CHASSOT, Les sources de la responsabilité du transporteur aérien international : entre conflit et complémentarité, Zurich, Schulthess Verlag, 2012, p. 135.
[17] Article 28 de la Convention de Varsovie et article VIII de la Convention complémentaire à la Convention de Varsovie, pour l'unification de certaines règles relatives au transport aérien international effectué par une personne autre que le transporteur contractuel, signées à Guadalajara le 18 septembre 1961 (Convention de Guadalajara).
[18] Pièce I-1.
[19] Pièce I-1.
[20] Il pourrait y avoir des familles additionnelles si un passager (1) n’a pas acheté son billet en France et (2) avait un point de destination autre que la France, mais (3) avait sa résidence principale et permanente au moment de l'accident en France.
[21] Admissions en date du 29 octobre 2015.
[22] Voir, par exemple, Anvil Mining Ltd. c. Association canadienne contre l’impunité, 2012 QCCA 117 (CanLII); Zuckerman c. Target Corporation, 2015 QCCA 1809 (CanLII).
[23] Filion c. Québec (Procureure générale), 2015 QCCA 352 (CanLII), par. 48. Voir aussi Québec (Société des loteries) c. Brochu, 2006 QCCA 1117 (CanLII), par. 21; Imperial Tobacco Canada Ltd. c. Létourneau, 2012 QCCA 2013 (CanLII), par. 39-40.
[24] Voir, par exemple, Bisaillon c. Université Concordia, 2006 CSC 19 (CanLII), par. 17; Hocking c. Haziza, 2008 QCCA 800 (CanLII), par. 150; Brito c. Pfizer Canada inc., 2008 QCCS 2231 (CanLII), par. 101.
[25] Bisaillon, préc. note 24, par. 22.
[26] Hocking, préc. note 24, par. 150; Brito, préc. note 24, par. 102-103, 110.
[27] Art. 3148 C.c.Q., al. 1 et 2.
[28] Recherches internationales Québec c. Cambior inc., J.E. 98-1905 (C.S.); Brito, préc. note 24, par. 87; Union des consommateurs c. Bell Canada, 2012 QCCA 1287 (CanLII); Picard c. Air Canada, 2011 QCCS 5186 (CanLII); Neale c. Groupe Aéroplan inc. (jugement rectifié le 2012-05-11), 2012 QCCS 902 (CanLII). Voir aussi Société canadienne des postes c. Lépine, 2009 CSC 16 (CanLII), par. 38; sur la reconnaissance d’un jugement sur une action collective en Ontario.
[29] Art. 3148 C.c.Q., al. 3.
[30] Werner c. Saab-Scania AB, 500-06-000004-800, jugement du 30 juillet 1980, p. 9 (appel rejeté, 500‑09-001005-800, 19 février 1982, sans traiter de cette question); Goyette c. GlaxoSmithKline inc., 2009 QCCS 3745 (CanLII); Chabot c. WestJet, 2013 QCCS 5297 (CanLII); Albilia c. Apple inc., 2013 QCCS 2805 (CanLII); Nova c. Apple Inc., 2014 QCCS 6169 (CanLII); Cunning c. FitFlop Ltd., 2014 QCCS 586 (CanLII), par. 40-56; Wilkinson c. Coca-Cola Ltd., 2014 QCCS 2631 (CanLII), par. 97-101.
[31] 2014 CSC 55 (CanLII).
[32] 2014 CSC 67 (CanLII), par. 41.
[33] Stott v. Thomas Cook Tour Operators Limited, [2014] UKSC 15, par. 34.
[34] Thibodeau, préc. note 32, par. 50 à 57; Plourde c. Service aérien FBO inc. (Skyservice), 2007 QCCA 739 (CanLII); Simard c. Air Canada, 2007 QCCS 4452 (CanLII), par. 17-24; Carter c. Air Canada, 2012 QCCQ 2587 (CanLII), par. 33; Titulescu v. United Airlines Inc., 2014 ONSC 5683 (CanLII); O’Mara v. Air Canada, 2013 ONSC 2931 (CanLII), par. 61-73; Sidhu v. British Airways Plc., [1997] A.C. 430; El Al Israel Airlines, Ltd. v. Tsui Yuan Tseng, 525 U.S. 155 (1999); Stott, préc. note 33; Mark Andrew GLYNN, « Montreal Convention Ousts All : Canadian Courts Rule on Exclusivity » (2013), 38 McGill Annals of Air and Space Law 543;
[35] Thibodeau, préc. note 32, par. 57.
[36] Stott, préc. note 33, par. 34.
[37] L. CHASSOT, préc. note 16, p. 294.
[38] L. CHASSOT, préc. note 16, p. 338.
[39] Lamborghini (Canada) Inc. c. Automobili Lamborghini S.P.A., 1996 CanLII 6047 (QC CA), [1997] R.J.Q. 58 (C.A.), p. 68; Anvil Mining, préc. note 22, par 99.
[40] Lamborghini, préc. note 39, p. 68.
[41] Anvil Mining, préc. note 22.
[42] Il reconnaît l’existence de l’action collective ou quelque chose qui y ressemble en Allemagne, France, Grande-Bretagne et Égypte, mais semble plaider que c’est différent de ce qui existe au Québec. De toute façon, vu la conclusion à laquelle le Tribunal en est arrivé sur les questions de compétence, une action collective en Allemagne, Grande-Bretagne et Égypte ne pourrait bénéficier qu’à un nombre très restreint de familles. L’action collective en France pourrait viser un nombre plus important de familles.
[43] La seule action collective pouvant viser l’ensemble des familles serait en Espagne.
[44] Pièce R-8(2).
[45] Pièces R-8(3) à R-8(8).
[46] Pièces R-8(5), R-8(7), et R-8(9) à R-8(15). Dans le cas de la Belgique, l’article porte sur les actions collectives (pièce R-8(11)).
[47] Pièce R-8(13).
[48] Pièces R-8(15) et R-8(16).
[49] Pièce R-8(17).
[50] Erwan POISSON, « Recours collectifs en France : état des lieux et perspectives », dans Service de la formation continue, Barreau du Québec, vol. 397, Colloque national sur les recours collectifs – Développements récents au Québec, au Canada et aux États-Unis, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2015, p. 33.
[51] Christopher HODGES, « A New Framework for Collective Redress in Europe », dans Service de la formation continue, Barreau du Québec, vol. 312, Développements récents en recours collectifs 2009, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2009, p. 3.
[52] Pièce I-2.
[53] Pièce I-3.
[54] Pièce I-6.
[55] Pièce I-7.
[56] Pièce R-8(14), réponse à la question 21.
[57] Lamborghini, préc. note 39, p. 68.
[58] Serge GAUDET et Patrick FERLAND, « Le droit international privé », dans Collection de droit 2015‑2016, École du Barreau du Québec, vol. 6, Contrats, sûretés, publicité des droits et droit international privé, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2015, p. 245, à la page 284;
[59] Pièce I-7.
[60] Annexe II, Dispositions relatives à la responsabilité du transporteur dans le cas de la mort d’un voyageur, art. 2 et 3(c).