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Union des artistes et Société Radio-Canada

no. de référence : No B-315

TRIBUNAL D’ARBITRAGE



CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC








Date :


20 décembre 2005



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DEVANT L’ARBITRE :


Me Lyse Tousignant

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UNION DES ARTISTES



« l’U.D.A. »





Et





SOCIÉTÉ RADIO-CANADA



« la Société »







Grief :


No B-315














Pour l’U.D.A. :


Me Annie Morin

Pour la Société


Me Pascal Rochefort



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SENTENCE ARBITRALE

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LE GRIEF ET LA PREUVE :

[1] Le grief déposé (pièce U-1) se lit comme suit dans ses mentions essentielles :

« Producteur : SRC

Production : « RDI Junior »

EXPOSÉ DU GRIEF

Défaut du producteur de se conformer à l’entente collective et en particulier en ne respectant pas, notamment mais de façon non exclusive, ni limitative, les dispositions relatives à l’engagement d’artistes pour des fonctions prévues à l’entente et aux paiements afférents.

En effet, il y a eu production et interprétation de saynètes qui n’ont pas fait l’objet de contrats et de paiements aux artistes.

REDRESSEMENT

Que le producteur se conforme à l’entente collective;

Que le producteur fasse signer un contrat pour tous les artistes ayant participé à « RDI Junior »;

Que le producteur complète et dépose à l’UDA des contrats conformes à une production;

Qu’il paie aux artistes visés les cachets qu’ils auraient dû recevoir en envoyant copie à l’UDA des documents envoyés aux artistes;

Qu’il achemine à l’UDA toutes les remises et contributions applicables découlant de l’entente collective;

Que le producteur acquitte un intérêt au taux légal en vigueur sur toutes les sommes dues à compter des dates de production;

Que l’arbitre réserve à l’UDA le droit de demander toute autre conclusion pertinente au présent grief, si besoin est. »



LES PRÉALABLES DE L’U.D.A. :

[2] Dès le début de l’instruction, la procureure de soutenir que, l’entente collective intervenue entre l’U.D.A. et la Société (pièce U-2), s’applique en l’instance alors que la Société soutient qu’un des artistes, en l’instance, monsieur Normandin, n’est pas couvert par l’entente, n’étant pas un comédien.





LES PRÉALABLES DE LA SOCIÉTÉ :

[3] Le procureur de soutenir que, selon la Société, tous les éléments pour résoudre le litige se retrouvent à l’entente collective, la question étant de savoir si monsieur Normandin était un personnage ou non.

[4] L’essentiel des représentations des parties peut se résumer comme suit :



A) Argumentation de l’U.D.A. :

[5] Si la Société soutient que les activités que fait monsieur Normandin, n’en sont pas de comédien, et si l’entente ne s’applique pas, il faut nécessairement déférer au Tribunal canadien des relations professionnelles artistes-producteurs conformément à l’article 41 de la Loi afin que ce dernier décide si l’entente collective s’applique ou non à monsieur Normandin, ou à toute autre personne. D’ailleurs, le fait de déterminer s’il joue un "personnage" dans RDI Junior est une façon indirecte de poser la question à savoir, s’il est visé ou non par l’entente collective d’où, il s’agit d’une question qui doit être déférée au Tribunal.



B) Argumentation de la Société :

[6] Si la position de la Société est fort semblable à celle soutenue par l’U.D.A., le procureur soumet que c’est à l’étude de la preuve que l’arbitre pourra décider si monsieur Normandin interprète ou non un "personnage" , le tout est à l’intérieur de la juridiction de l’arbitre sinon, quelle est l’utilité de définir "comédien"? De plus l’U.D.A. peut aller directement au Tribunal en cas d’interprétation or, l’U.D.A. a choisi de faire grief. Dès qu’il y a désaccord quant à un épisode particulier, monsieur Normandin peut avoir fait un "personnage", il revient à l’arbitre de le déterminer à l’écoute de la preuve.

[7] Bien que l’article 41 de la Loi emploi l’impératif « doit » en cas de désaccord sur l’application de l’entente à une personne, il n’en reste pas moins que lorsque monsieur Normandin interprète un "personnage", la Société est d’accord pour le payer selon le cachet d’où, il n’y a pas de désaccord au sens de l’article 41 de la Loi, le tout est de savoir s’il fait un "personnage".



C) Réplique de l’U.D.A. :

[8] Les définitions permettent de distinguer les différentes fonctions couvertes par l’entente collective et, dans ce cadre, au départ, l’entente s’applique or, dans le présent cas, il n’y a pas telle admission. Le dépôt d’un grief est la procédure normale lorsqu’il y a contravention à l’entente collective et le Législateur a prévu à la loi qu’un grief, une question soulevée par celui-ci peut être déférée au Tribunal. L’article 2.1 de l’entente prévoit qu’elle s’applique à la personne que la Société engage dans une des fonctions prévues. Monsieur Normandin a été engagé à titre de recherchiste mais, lorsqu’il apparaît « en champ », il est visé par l’entente U-2; il peut, dans certains épisodes, ne pas être comédien et faire autre chose d’où, il faut déférer au Tribunal. La procureure de demander s’il y a confession de jugement partiel pour les épisodes où monsieur Normandin est déguisé.



D) Réponse de la Société :

[9] Le procureur de plaider qu’il ne scinde pas et de réitérer qu’à la lumière de la preuve (visionnement de l’ensemble des épisodes), l’arbitre aura les éléments nécessaires pour déterminer s’il s’agit d’un "personnage" au sens de l’entente. Monsieur a été engagé comme recherchiste et si, « en champ », il a effectué des tâches définies à l’entente, le tout ne va pas "à la racine" du certificat.



DISPOSITIONS LES PLUS PERTINENTES :



Loi sur le statut de l’artiste :

41 (1) Renvoi au Tribunal

41. (1) Toute question soulevée dans un arbitrage et se rapportant à l’existence d’un accord-cadre, à l’identité des parties qu’il lie ou à son application à un secteur donné ou à une personne doit être déférée au Tribunal par l’arbitre ou le conseil d’arbitrage pour instruction et décision.

41 (2) Poursuite de la procédure d’arbitrage

(2) Le renvoi ne suspend la procédure engagée devant lui que si l’arbitre ou le conseil d’arbitrage, selon le cas, décide que la nature de la question le justifie ou si le Tribunal lui-même ordonne la suspension.





Entente collective

1.15 Comédien

La personne qui interprète un personnage dans une œuvre dramatique selon la participation suivante :

[…]

2.1

La présente entente concerne la personne que la Société engage à l’un des titres ou dans l’une des fonctions suivantes :

[…] »



(18 fonctions sont énumérées dont celle de comédien)







ANALYSE ET DÉCISION

[10] Essentiellement, il ressort des argumentations des parties que monsieur Normandin a été embauché à titre de recherchiste. Il aurait fait du « en champ » sous différentes formes.

[11] Très sommairement, selon la procureure de l’U.D.A., l’article 41 de la Loi commande à l’arbitre de déférer au Tribunal la question de savoir si l’entente collective (U-2) s’applique, entre autres, à monsieur Normandin. La question posée par le litige est de savoir si l’entente s’applique d’où, l’article 41 de la Loi traite de la situation. D’autant que ce n’est pas juste une question de définition, il se peut fort bien que ce soit autre chose qu’un "personnage". Alors que, selon le procureur de la Société, monsieur a été engagé comme recherchiste et si, « en champ » il a effectué des tâches définies à l’entente, il ne croit pas que la situation "va à la racine du certificat".

[12] La question fondamentale, l’essence de la question soumise est de savoir si l’entente collective s’applique à monsieur Normandin, recherchiste, lorsqu’il était « en champ » dans le cadre de la Production RDI Junior.

[13] Même si la Société soutient que si monsieur Normandin a fait un "personnage", l’entente s’applique, il n’en reste pas moins que la question fondamentale est effectivement de savoir si l’entente s’applique à monsieur Normandin, tenant compte de la situation de ce dernier. Qui plus est, il peut faire autre chose qu’un "personnage". Il y a tout le contexte de l’accréditation, et l’engagement qui a été fait à titre de recherchiste. Il est difficile de dire à la fois l’entente s’applique si…. et l’entente ne s’applique pas si…. à une personne. Certes, il peut arriver des situations où il y aura litige sur les fonctions exercées mais, au départ, l’entente s’applique, ce qui n’est pas notre cas et justement pour trancher la question, il faut, entre autres, se référer à la portée intentionnelle de l’accréditation, sans nier que les définitions qui se retrouvent à l’entente peuvent servir d’aide mais le cœur du litige est de savoir si, embauché comme recherchiste et ayant fait du « en champ », l’entente s’applique à monsieur.

[14] Dans le présent cas, il faut de plus faire preuve d’une certaine prudence d’autant plus que l’article 41 de la Loi emploie l’impératif "doit". De cette formulation, il se dégage que l’intention du Législateur est de confier au Tribunal et non aux parties toute question touchant l’application d’un accord à une personne donnée. Dans ce cadre, tenant compte de l’article 41 de la Loi sur le statut de l’article;



- L’arbitre DÉFÈRE le présent litige, le grief B-315, au Tribunal canadien des relations professionnelles artistes- producteurs;

- SUSPEND en conséquence l’audition du grief jusqu’à la décision du Tribunal;

- RÉSERVE COMPÉTENCE sur le quantum le cas échéant.





EN FOI DE QUOI, J’AI SIGNE À MONTRÉAL,

CE 20ième JOUR DU MOIS DE DÉCEMBRE 2005










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Me Lyse Tousignant, arbitre